10 août, 2018Avec six personnes – dont des travailleurs et des marchands ambulants – tuées par l’armée nationale du Zimbabwe lors des violences post-électorales, les syndicats zimbabwéens ont des doutes sur les perspectives devant amener à la transition démocratique.
Les Zimbabwéens s’étaient rendus aux urnes dans l’espoir d’inverser le cours des crises politiques et économiques qui sévissent depuis des décennies. Raisonnablement malgré tout, parce que le chômage atteint plus de 90 pour cent, les usines ont fermé et le vol des salaires est courant.
Le manque de liquidités, l’accès limité à l’eau potable, les pannes d’électricité et les infrastructures en ruine ont provoqué des migrations massives de millions de personnes, dont la majorité survit misérablement dans le secteur informel. Seuls six pourcent de la population active est employée dans le secteur structuré.
Avec la destitution de Robert Mugabe, Chef de l’Etat durant 38 ans, rendue possible grâce à l’aide de l’armée, de gros espoirs reposaient sur les élections des représentants municipaux, des parlementaires et du Président du 30 juillet. Le parti au pouvoir, l’Union nationale africaine du Zimbabwe - Front patriotique (ZANU-PF), a remporté plus des deux tiers des sièges au Parlement, qu’il partage avec l’alliance d’opposition du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), un parti plus petit, et une candidate indépendante.
Néanmoins, les retards pris dans l’annonce du scrutin présidentiel ont donné lieu, le 1er août, à Harare, à des manifestations de l’opposition alléguant du « vol » des résultats. Arrivée la première pour disperser les manifestants qui se dirigeaient vers le centre de dépouillement des bulletins de vote, la police a été rejointe par l’armée qui a commencé à tirer à balles réelles et sans discernement dans des rues bondées, tuant six personnes et en blessant des dizaines d’autres. Durant le chaos, des tirs ont également été effectués en direction des bureaux du Congrès des syndicats du Zimbabwe.
Sylvia Maphosa rentrait chez elle après son travail, à Harare, lorsqu’elle a été mortellement touchée dans le dos durant les tirs à balles à réelles de l’armée.
Maphosa, qui était membre de l’affilié à IndustriALL, le syndicat des travailleurs de l’énergie du Zimbabwe (ZEWU), travaillait à l’Office national de l’eau du Zimbabwe.
Dans son message de condoléances, ZEWU, a déclaré:
Maphosa était une membre fervente du syndicat ZEWU auquel elle avait adhéré en 2003. Elle est restée fidèle à l’organisation jusqu’à sa mort prématurée, qui a choqué tous ceux qui la connaissait comme une personne humble.
Aussi, le syndicat réclame une enquête approfondie sur l’incident pour veiller à ce que les responsables de cet acte odieux soient traduits en justice et que tout le poids de la loi tombe sur eux.
Human Rights Watch a fait part de passages à tabac et d’intimidations des partisans de l’opposition par les « forces de sécurité et des tireurs non identifiés » dans les townships de Harare où vit la majorité des travailleurs.
Les brutalités exercées par l’armée ont été condamnées par les Nations Unies qui appelle à « la plus grande retenue ». En outre, l’Union européenne, le Canada, la Suisse et les Etats-Unis d’Amérique ont déploré « l’explosion de la violence et la perpétration de violations graves des droits de l’homme ».
Wiseman Garira, présidente du Conseil d’IndustriALL du Zimbabwe, représentant huit affiliés dans les secteurs du textile et de l’habillement, de l’ingénierie, de la chimie et du plastique, de l’énergie, du cuir et des chaussures, des métaux et des mines, a dénoncé la façon dont laquelle la Commission électorale du Zimbabwe a géré les bureaux de vote, en ne fournissant pas à temps, par exemple, la liste des électeurs aux partis d’opposition.
Même les résultats sont « discutables et leur divulgation a pris plus de temps que nécessaire », a ajouté Garira.
Paule France Ndessomin, Secrétaire régionale d’IndustriALL pour l’Afrique subsaharienne, a ajouté:
Le droit de manifester est garanti par la Constitution du Zimbabwe. En cas de manifestations violentes, il est de la responsabilité de la police, et non pas de l’armée, de maintenir l’ordre public. A ce titre, l’utilisation de balles réelles contre la fuite des civils est scandaleuse.