23 septembre, 2014À l’occasion de son 50e anniversaire, le Rapport sur le commerce et le développement 2014 de la CNUCED met en cause la théorie du commerce mondial qui prévaut et selon laquelle la réduction des barrières commerciales est la voie menant au développement.
La Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, CNUCED, vient de publier son dernier Rapport sur le commerce et le développement. Contrairement à la théorie du libre échange qui prévaut, le rapport avance que les contraintes commerciales sont dues à une faible demande mondiale plutôt qu’à de fortes barrières commerciales, de sorte que des efforts visant à dynamiser les exportations par le biais d’une réduction des salaires seront contre-productifs. Ce qu’il faut, c’est une reprise solide au niveau national emmenée par la demande intérieure.
Dans son aperçu du Rapport sur le commerce et le développement de la CNUCED, le Secrétaire général Mukhisa Kituyi tire fermement la sonnette d’alarme par rapport à l’érosion par le biais des accords de libre-échange de la marge d’action, qui désigne ”la liberté et la capacité des gouvernements de déterminer et de mettre en œuvre le dosage idéal de mesures économiques et sociales pour parvenir à un développement équitable et durable de leur pays”. Il constate que ”les accords commerciaux régionaux contiennent des dispositions toujours plus détaillées et, dans bien des cas, des règles qui limitent les stratégies nationales de développement du point de vue de la conception et de la mise en œuvre.”
Le rapport note une résurgence de l’intérêt pour des politiques industrielles et souligne qu’il est important que de telles politiques soient centrées sur le développement. Les pays en développement doivent avoir une marge d’action la plus large possible pour avancer des politiques qui fonctionnent dans les conditions particulières qui sont les leurs, et ”non qu’elle soit sans cesse réduite par les institutions internationales qui ont été créées précisément pour contribuer à plus d’équilibre et d’équité.” Il invite les gouvernements qui visent, par exemple, à maintenir une stabilité macroéconomique en régulant à nouveau leur système financier à prendre sérieusement en compte le risque qu’il existe à conclure des accords de commerce et d’investissement bilatéraux et multilatéraux qui réduisent leur marge d’action politique.
Le Secrétaire général d’IndustriALL Jyrki Raina réagit :
Il est rassurant de savoir que l’organe des Nations Unies chargé d’identifier la véritable relation entre le commerce et le développement est d’accord avec IndustriALL sur le rôle primordial des politiques industrielles dans la création d’emplois, la croissance et le développement et qu’il se fasse un ferme défenseur de davantage de marge d’action politique pour les gouvernements afin qu’ils légifèrent dans l’intérêt de leurs propres populations.
Le Directeur du département de la mondialisation de la CNUCED, Richard Kozul-Wright, a déclaré au Financial Times que le libre-échange ne ferait pas revenir la croissance mondiale et que les pays en développement, en particulier, avaient besoin de davantage de liberté d’action pour pouvoir mener leurs propres politiques économiques en dehors des restrictions imposées par les accords de libre-échange bilatéraux, régionaux ou mondiaux. Il a cité le Brésil comme pays ayant réussi à utiliser l’intégration verticale de politiques industrielles pour promouvoir des secteurs individuels en parallèle avec un minimum de législation salariale et des programmes de redistribution des revenus.
Le rapport de la CNUCED soutient que les pays qui signent des accords commerciaux dans le but de faire partie des chaînes d’approvisionnement mondiales n’en retirent que peu de bénéfices, voire pas du tout. En réalité, cela peut les confiner dans des activités à faible valeur ajoutée en raison de la concurrence sur les bas salaires, alors qu’un contrôle strict de la propriété intellectuelle et des stratégies de marque de la part des multinationales les empêchent de s'élever dans la chaîne de valeur.