8 mars, 2016Le parlement turc étudie un projet de loi proposé par le gouvernement et qui donne aux agences d'emploi privées le droit de recruter des travailleurs dans une série de secteurs. Si elle est adoptée, cette loi provoquerait un bouleversement sur le marché du travail, favorisant les contrats à courte durée au détriment des contrats permanents, en permettant une généralisation des contrats précaires.
Ce projet de loi autoriserait pour les entreprises des quotas de travailleurs intérimaires dans certaines circonstances. Mais les syndicats turcs craignent que cela mène à un recours excessif au travail intérimaire pour "une augmentation imprévue du volume d'activités de l'entreprise" ou "des crêtes d'activité périodiques" que les employeurs pourraient invoquer à tout moment dans un système de production.
Une commission parlementaire a approuvé ce projet de loi qui entérinerait le système de courtage de main-d’œuvre qui devrait être soumis à la Grande Assemblée nationale (TBMM). Si elle l'adopte, des millions de travailleurs vont se retrouver avec des contrats d'agence d'intérim plutôt qu'avec des contrats permanents.
Les syndicats turcs, parmi lesquels les affiliés d'IndustriALL Global Union, s'opposent à ce projet de loi et mobilisent leurs membres dans plusieurs campagnes.
Une généralisation du travail intérimaire affaiblit les normes internationales du travail et limite le champ d'application des conventions collectives, ce qui affecte gravement la capacité de négociation des syndicats.
Dans la lettre qu'il envoie au Premier ministre turc Ahmed Davudoğlu, le Secrétaire général d'IndustriALL Global Union, Jyrki Raina, écrit que ce projet est inacceptable et risque de créer un marché du travail proche de l'esclavagisme en Turquie :
"Avec nos affiliés de votre pays, nous sommes profondément inquiets et indignés des énormes conséquences que ce projet de loi pourrait avoir pour le marché du travail et les activités syndicales."
"Nous appelons le gouvernement turc à retirer le projet de loi autorisant un système de courtage de main-d’œuvre et à nouer un authentique dialogue avec toutes les organisations syndicales afin d'élaborer des politiques et des instruments favorisant l'emploi permanent, direct et sûr fondé sur les droits humains et syndicaux fondamentaux."
En 2009, le précédent gouvernement turc avait tenté de faire passer un texte similaire sans avoir consulté les principales organisations de travailleurs du pays. Le Président de l'époque avait finalement opposé son véto.