2 mars, 2021PARTIE 2: «Explication de la violence domestique et du rôle des syndicats». Nous ne pouvons pas lutter contre la violence domestique si nous ne pouvons pas la reconnaître.
La violence domestique comprend tous les actes de violence physique, sexuelle, psychologique ou économique qui se produisent au sein de la famille ou du foyer ou entre des conjoints ou partenaires, anciens ou actuels. La violence domestique est un mode de comportement utilisé par une personne pour contrôler ou dominer une autre avec laquelle elle a, ou a eu, une relation intime ou de type familial.
8. Pourquoi la violence domestique a-t-elle augmenté pendant la Covid-19 ?
On a constaté une augmentation au plan mondial des déclarations de violence domestique pendant la pandémie de Covid-19.
Les conséquences sociales de l’épidémie et des confinements qui y sont liés, avec une perte d’interactions sociales, peuvent avoir accru les tensions inhérentes à la cohabitation forcée et augmenté les risques de violence domestique.
La violence domestique, souvent commise par les hommes, est profondément enracinée dans les masculinités patriarcales qui conduisent au pouvoir et au contrôle des hommes sur les femmes. Au fur et à mesure que la crise et les incertitudes au niveau des individus et des ménages se développent, les auteurs de violences peuvent vouloir réaffirmer leur contrôle et exprimer les frustrations causées par le confinement en multipliant les épisodes de violence.
Le ralentissement économique généré par la Covid-19 avec l’augmentation du chômage et les pertes de revenus, est particulièrement dangereux pour les femmes dans les relations de violence, car le contrôle économique est un outil clé pour les agresseurs. L’insécurité financière peut obliger les victimes à rester avec leurs agresseurs. Il est donc crucial que les gouvernements donnent la priorité à la problématique de la violence entre partenaires intimes dans tous les aspects de leur réponse politique à la pandémie de Covid-19.
Sources : ONU Femmes, Brief COVID-19 and Ending Violence Against Women and Girls ; OCDE, Women at the core of the fight against COVID-19 crisis
9. L’alcool et les drogues justifient-ils la violence domestique ?
Il n’y a aucune excuse ou justification à la violence domestique. Les agressions contre les femmes sont l’héritage d’un état d’esprit où les femmes sont considérées comme des objets ou des propriétés. Les partenaires violents sont souvent protégés par un certain niveau d’acceptation sociale de la violence à l’égard des femmes, considérée comme étant “normale”.
Le stress, la drogue et l’alcool sont des facteurs qui augmentent le risque de violence domestique et peuvent déclencher des agressions. Mais on ne peut pas leur imputer la responsabilité de la violence domestique. De nombreuses personnes sont stressées, consomment de l’alcool ou des drogues et ne sont pas abusives et rien de tout cela ne peut servir d’excuse pour justifier une quelconque forme d’abus.
Il existe également un mythe très répandu selon lequel la violence domestique est un “crime passionnel”, une perte de contrôle momentanée. Mais la violence domestique consiste rarement à perdre le contrôle, il s’agit plutôt de prendre le contrôle. L’agresseur a le contrôle sur la personne qu’il maltraite.
Source : Women’s aid
10. Le comportement des victimes/survivant(e)s peut-il justifier la violence domestique ?
Trop souvent, les victimes/survivantes sont montrées du doigt et les hommes violents sont excusés. Peut-être réagissait-il au comportement provocateur de sa femme ou celle-ci l’avait-elle en quelque sort mérité. On en arrive à reprocher à la femme de l’avoir provoqué.
Mais il n’y a pas d’excuse à la violence domestique. Personne ne mérite d’être battu ou tourmenté mentalement.
Cette pratique répandue et profondément enracinée est dangereuse, car toute référence à la provocation signifie que nous rejetons la faute sur la femme et déchargeons l’agresseur de la responsabilité de ses actes. Les abus ou la violence de toute nature ne sont jamais la faute de la victime/survivante. Seul l’agresseur doit être pointé du doigt.
Source : Women’s aid
11. Pourquoi est-il dangereux et préjudiciable de blâmer les victimes ?
Malgré des évolutions sociales importantes, les hommes continuent à grandir dans des sociétés patriarcales et dans une culture profondément dominée par les hommes, où la violence à l’égard des femmes est courante et acceptable. Malheureusement, il arrive encore que les femmes indiquent que lorsqu’elles se déclarent victimes, elles ne sont pas crues ou sont blâmées pour leur comportement.
Comme pour toute forme de violence fondée sur le sexe, le fait de blâmer les victimes est préjudiciable. Il sert à excuser et à absoudre partiellement les auteurs de la violence. Un climat de tolérance envers cette forme de violence peut empêcher les victimes/survivantes de chercher de l’aide ou de signaler la violence et encourager l’impunité des auteurs. Il est essentiel que toute personne qui signale un cas de violence soit sûre que le signalement d’un tel incident sera pris au sérieux et écouté.
Source : Domestic violence and abuse: a trade union issue, guide d’UNISON
12. Les hommes peuvent-ils également être victimes/survivants de la violence domestique ?
Même si les femmes représentent la grande majorité des victimes/survivantes de la violence, les hommes et les garçons peuvent également être victimes. Beaucoup d’hommes victimes/survivants hésitent à le signaler par crainte de ne pas être crus ou d’être considérés comme faibles.
13. Pourquoi les victimes/survivantes de la violence domestique restent-ils et ne signalent-ils pas les abus ?
Il n’est pas facile de quitter une relation violente ; les éléments clés de la violence domestique sont la honte et l’isolement.
Beaucoup de femmes craignent de ne pas être crues et elles ont peur de perdre leurs enfants, une menace courante des auteurs de ces actes. Ces problèmes, associés à l’isolement social imposé dans le cadre de relations abusives, à la faible estime de soi, aux préoccupations financières et à la crainte de violences futures, font que les femmes peuvent avoir le sentiment de n’avoir d’autre choix que de poursuivre la relation, en particulier s’il y a des enfants ou d’autres adultes à leur charge.
Elles restent parce qu’elles croient que leurs partenaires ont le potentiel de changer. Cela rend la situation très complexe et signifie qu’il y a rarement des solutions simples. Elles se sentent toujours responsables de la cohésion de la famille et du maintien des relations. En outre, l’agresseur sait comment atteindre la victime/survivante, comment lui faire du mal, souvent de manière subtile, qui peut ne pas être comprise par les autres.
Les victimes/auteurs peuvent être confrontés à la perspective de vivre dans un logement temporaire, de recevoir des allocations et de craindre que les enfants fassent l’objet d’un placement. Le départ peut signifier la relocalisation dans une région inconnue, loin de la famille et des amis.
Sources : Unite the Union Domestic Violence & Abuse - a negotiators guide ; Domestic violence and abuse : a trade union issue, a UNISON guide
14. Que disent la Convention 190 et la Recommandation 206 sur la violence fondée sur le sexe ?
Le préambule de la Convention note que “la violence domestique peut se répercuter sur l’emploi, la productivité ainsi que sur la santé et la sécurité, et que les gouvernements, les organisations d’employeurs et de travailleurs et les institutions du marché du travail peuvent contribuer, dans le cadre d’autres mesures, à faire reconnaître les répercussions de la violence domestique, à y répondre et à y remédier”.
En tant que telle, la Convention demande aux Membres de “prendre des mesures appropriées pour (...) reconnaître les effets de la violence domestique et, dans la mesure où cela est raisonnable et pratiquement réalisable, atténuer son impact dans le monde du travail” (article 10(f)).
La recommandation fournit des orientations supplémentaires. Elle stipule que
“Les Membres devraient prendre des mesures appropriées pour promouvoir la reconnaissance effective du droit de négociation collective à tous les niveaux comme moyen de prévenir la violence et le harcèlement et d’y remédier et, dans la mesure du possible, d’atténuer l’impact de la violence domestique dans le monde du travail” (point 4 a)).
L’instrument énumère les mesures possibles pour atténuer ces effets : un congé pour les victimes de violence domestique ; des modalités de travail flexibles et une protection pour les victimes de violence domestique ; une protection temporaire des victimes de violence domestique contre le licenciement, selon qu’il convient, sauf pour des motifs sans lien avec la violence domestique et ses conséquences ; la prise en compte de la violence domestique dans l’évaluation des risques sur le lieu de travail ; un système d’orientation vers les dispositifs publics visant à atténuer la violence domestique, lorsque ces dispositifs existent ; la sensibilisation aux effets de la violence domestique (Point 18).
Source : Convention 190 de l’OIT, Recommandation 206 de l’OIT
15. Pourquoi la violence domestique est-elle également un problème sur le lieu de travail ?
Bien que la violence domestique puisse trouver son origine au sein du foyer, elle peut s’étendre au monde du travail.
Les partenaires violents peuvent suivre les victimes sur leur lieu de travail ou utiliser des technologies téléphoniques ou informatiques liées au travail pour les intimider, les harceler ou les contrôler, ou encore travailler au même endroit que leurs victimes.
La violence domestique peut également s’étendre au monde du travail par le biais du stress et des traumatismes qu’elle cause aux victimes/survivant(e)s de la violence domestique, ce qui a un impact sur leurs performances au travail.
Les personnes victimes de violence domestique doivent s’absenter du travail à cause de la violence et peuvent être en retard au travail. Cela affecte leur capacité à se rendre au travail parce qu’elles sont blessées, menacées ou se sont fait voler leurs clés de voiture ou leur argent pour les empêcher de se rendre au travail par leur agresseur.
En plus d’affecter la sécurité de l’individu, la violence domestique peut également affecter la sécurité des autres salariés et avoir un impact négatif sur l’environnement de travail. Les collègues subissent les effets négatifs de la violence domestique en raison de l’augmentation de la charge de travail, du stress, des appels ou des visites de l’agresseur de leur collègue et d’autres risques potentiels pour la sécurité. La violence domestique peut créer des conflits et des tensions entre les survivant(e)s/victimes et leurs collègues.
Les mesures mises en place pour faire face à la crise du coronavirus et l’augmentation du télétravail, font que le domicile est le nouveau lieu de travail pour beaucoup. C’est un lieu de travail dangereux pour les femmes susceptibles d’être victimes de violences domestiques.
Source : Note de l’OIT sur l’impact de la violence domestique sur le monde du travail, 2020 ; TUC, Support in the workplace for victims of domestic abuse