20 décembre, 2013Le Comité de coordination pour l'Unité du secteur de la mine et de l'énergie (Coordinadora para la Unidad del Sector Minero Energético, CUSME) demande au gouvernement de garantir que le syndicat des travailleurs du pétrole (Unión Sindical Obrera, USO) puisse poursuivre ses activités syndicales sans ingérence, de libérer les travailleurs détenus, d'annuler les mandats d'arrêt et d'abandonner les procédures judiciaires intentées contre 39 membres de l'USO dont 34 portent sur des actions de protestation des travailleurs et de la communauté dirigées contre Pacific Rubiales dans la "république bananière" de Meta.
En 2011, les manifestations du département de Meta avaient eu un impact national. 12.000 travailleurs de l'industrie pétrolière avaient subi un siège militaire sans précédent, Pacific Rubiales et ses sous-traitants s'efforçant de réduire les manifestants au silence en les présentant comme des criminels, violant ainsi la liberté syndicale. L'USO a réagi en portant plainte devant la justice, mais les principaux témoins ont été arrêtés et mis en prison. En une seule journée, la procureure 239, Luisa Fajardo, a fait arrêter les militants Héctor Sánchez, José Dilio Naranjo et Campo Elías Ortiz, inculpés de conspiration à but criminel et enlèvement aggravé, des délits assortis de peines de dix à trente ans de prison.
Pacific Rubiales est devenue un État dans l'État, l'armée, les maires et les procureurs étant totalement acquis à ses intérêts. Elle a étranglé les médias tout en menant une campagne de publicité et de promotion consistant notamment à sponsoriser l'équipe nationale de football.
Lors de l'audience publique de mise en accusation des inculpés, la procureure 239 a été jusqu'à déclarer que l'accusation de conspiration à but criminel reposait sur le fait que les trois hommes appartenaient à la même organisation, l'USO. Leur avocat a répondu que, jusqu'à présent, la constitution garantit la liberté d'association.
Le juge a alors refusé la présomption d'innocence des accusés et a prononcé leur détention provisoire, sachant pourtant que les délits dont ils étaient accusés sont ridicules et dénués de tout fondement. La procureure prétendait que les trois accusés dirigeaient 300 "hommes masqués" qui avaient enlevé 5.000 travailleurs en 2011. Elle affirmait aussi que Héctor Sánchez est un soldat de métier et connaît la stratégie militaire. Toutefois, elle a aussi déclaré que l'endroit où les faits sont censés s'être produits représente 57.000 fois la superficie de la place Bolivar de Bogota et que les gens et les véhicules pouvaient y pénétrer ou en sortir comme d'habitude.
Les soi-disant "hommes masqués" étaient quelques-uns des 12.000 travailleurs portant des vêtements de protection contre les intempéries et les risques professionnels et qui manifestaient contre les conditions dignes de l'esclavage que leur impose Pacific Rubiales depuis plus de dix ans. La procureure a intentionnellement omis de mentionner que les lieux étaient totalement bouclés par un bataillon du génie, les bérets-rouges, les SMAT, la police et les forces de sécurité privées de Pacific Rubiales.
Le Président de la CUT et de SINTRAELECOL, Oscar Orozco, a connu une situation similaire à Caldas. Alors qu'il avait échappé à quatre attentats, les autorités ont rappelé les gardes du corps affectés à sa protection. Il a alors fait l'objet d'un autre attentat qu'il est maintenant accusé d'avoir organisé lui-même. La procureure a requis la détention préventive, lui a interdit d'évoquer publiquement cette affaire et a interdit toute déclaration de soutien en sa faveur. Heureusement, le juge n'a pas suivi la procureure.
Le gouvernement invoque la loi sur la protection des citoyens et utilise le ministère public pour faire taire l'opposition sociale et politique. Le procureur de la république Alejandro Ordoñez est l'inquisiteur actuel du gouvernement. Il s'est spécialisé dans la destitution des membres de l'opposition politique et leur révocation à vie de toute fonction officielle. Ce fut le cas de la sénatrice Piedad Córdoba, et il vient aussi de destituer et exclure de toute fonction officielle pendant 15 ans le maire de Bogota, Gustavo Petro. Ces mesures rentrent dans le cadre d'une politique visant à faire échouer les pourparlers de paix avec l'insurrection armée qui se tiennent actuellement à La Havane.
La CUSME exige que le gouvernement "garantisse que l'USO soit en mesure de poursuivre ses activités syndicales sans ingérence (la procureure Luisa Fajardo refuse de donner de telles garanties), qu'il retire les mandats d'arrêt, abandonne les procédures judiciaires ouvertes contre 39 membres de l'USO, dont 34 portent sur des actions de protestation des travailleurs et de la communauté dirigées contre la "république bananière" de Pacific Rubiales dans le département de Meta, qu'il libère immédiatement les collègues détenus, donne des assurances que les procès seront équitables et les accusés auront droit à être défendus, qu'il transfère les procédures entamées contre l'USO aux services du procureur général et qu'il abroge la loi sur la sécurité des citoyens sur laquelle s'appuient toutes les mesures prises contre les mouvements sociaux".
IndustriALL Global Union appuie les revendications de la CUSME (voir http://www.industriall-union.org/fr/trois-dirigeants-syndicaux-detenus-en-colombie; il a appelé le gouvernement colombien à ordonner la libération immédiate des travailleurs et dirigeants syndicaux concernés et à mettre fin aux persécutions dirigées contre les travailleurs du pétrole et contre les mouvements syndicaux et sociaux du pays.