6 juin, 2023Dans une lettre commune adressée au Directeur général de l’Organisation internationale du travail (OIT), les syndicats indiens attirent l’attention sur les dispositions hostiles aux travailleurs contenues dans les quatre lois sur le travail récemment promulguées dans le pays. Ils demandent que les violations des droits des travailleurs par le gouvernement indien soient ajoutées à l’ordre du jour de la 111e Conférence internationale du travail qui se tient actuellement à Genève.
Les droits des travailleurs durement acquis et inscrits dans les anciennes lois sur le travail ont été dilués ou supprimés de manière antidémocratique et anticonstitutionnelle avec pour principe de “faciliter la pratique des affaires”.
Les fédérations syndicales d’Inde, parmi lesquelles les affiliés d’IndustriALL, ont fait entendre leur voix, notamment par des grèves générales, contre les politiques et les actions anti-ouvrières du gouvernement central.
En vertu du nouveau code du travail, le terme “usine” exclut toute responsabilité pour les employeurs comptant moins de 20 travailleurs. La durée quotidienne du travail est passée de huit à douze heures, les États du Maharashtra et du Karnataka étant déjà en train de la mettre en œuvre. Les employeurs qui comptent moins de 300 travailleurs dans leurs usines n’ont plus besoin de l’autorisation préalable des autorités gouvernementales compétentes pour procéder à des licenciements ou à des fermetures. Les syndicats craignent que l’introduction de “l’emploi à durée déterminée” dans la nouvelle loi n’augmente encore le travail précaire. La nouvelle loi ne garantit pas non plus la sécurité sociale à tous les travailleurs et travaillleuses.
En tant qu’État membre de l’OIT, l’Inde a l’obligation de respecter les normes internationales du travail, mais en réalité, le gouvernement mène des politiques contraires.
Cette lettre fait référence à la plainte déposée par les syndicats indiens auprès de l’OIT en 2015 concernant la violation de la convention 81 de l’OIT sur l’inspection du travail. La situation s’est depuis lors aggravée. La nouvelle loi sur la sécurité, la santé et les conditions de travail contredit les dispositions de la C81 qui appellent à la libre initiative des inspecteurs du travail pour entrer sur le lieu de travail sans préavis et à leur faculté d’engager à discrétion des poursuites judiciaires sans avertissement préalable. Dans le nouveau code, l’inspecteur du travail est un facilitateur qui ne peut pas engager de poursuites judiciaires contre un employeur, mais doit plutôt lui donner l’occasion de se conformer aux dispositions en matière de sécurité.
Les syndicats ont demandé que les violations délibérées et continues des normes internationales du travail par le gouvernement soient inscrites à l’ordre du jour de la CIT de cette année. Ils ont également demandé à l’OIT de prendre note de la plainte déposée par la CSI auprès du Comité de la liberté syndicale en 2019 concernant la violation de la liberté syndicale dans l’affaire Maruti Suzuki ainsi que le mépris du gouvernement pour les normes internationales dans l’organisation du G20 sous la présidence indienne.
Kemal Özkan, Secrétaire général adjoint d’IndustriALL, a déclaré à ce sujet :
“IndustriALL se tient fermement aux côtés de ses affiliés indiens et soutient leur demande en vue d’un débat au sein de la CIT sur les atteintes du gouvernement indien aux droits des travailleurs. Les gouvernements ont la responsabilité d’inclure les points de vue syndicaux lorsqu’ils prennent des décisions sur des questions liées au travail. Le mécanisme tripartite ne peut être ignoré”.
Illustration : CIT 2023, séance plénière, Crozet - Pouteau / OIT