5 février, 2020La Fédération des travailleurs de l'industrie du Myanmar (IWFM) a organisé une gigantesque manifestation, le 2 février à Yangon, pour protester contre la décision du Conseil d'arbitrage qui a refusé la réintégration totale de 260 travailleurs de l'usine Thong Thai Textile licenciés pour fait de grève.
Dès tôt le matin, cet affilié d'IndustriALL Global Union a mobilisé 15.000 membres de 80 lieux de travail différents pour défiler de l'usine Thong Thai Textile jusqu'au stade de football Aung Myay Tharyar.
Le Président de l'IFWM, Daw Khaing Zar, était en tête des manifestants qui scandaient :
"Le Conseil d'arbitrage doit respecter les droits de l'homme et les droits des travailleurs ! Stop aux décisions iniques qui violent les droits des travailleurs !"
260 travailleurs de la firme Thong Thai Textile ont été licenciés en bloc après avoir fait grève le 25 octobre 2019. Cette grève devait faire pression sur l'employeur pour qu'il accepte les 23 revendications du personnel, avec notamment une hausse des salaires, la titularisation des temporaires au terme de trois mois de stage, des cartes de sécurité sociale, des primes de qualification, le transport par autobus et la fin des heures supplémentaires excessives.
Depuis, les dirigeants du syndicat et de l'entreprise se sont rencontrés pour négocier à cinq reprises. Ces derniers ont accepté 15 des 23 revendications mais ont voulu que les huit restantes soient soumises au Conseil d'arbitrage, une instance gouvernementale qui statue sur les questions de travail.
Pour Daw Khaing Zar,
"Bien que la direction ait accepté 15 revendications sur 23, elle a refusé de signer une convention et a licencié les travailleurs pour participation à une grève illégale. L'organe d'arbitrage a statué que tous les 260 travailleurs devaient être réintégrés avec indemnité, mais l'entreprise a lancé une procédure d'appel qui a eu des conséquences défavorables.
"Le Conseil d'arbitrage a alors statué que 100 travailleurs devaient être réintégrés sans aucune indemnité, que 99 travailleurs poursuivis devant les tribunaux ne seront pas réintégrés, et que la réintégration des 61 restants est laissée à la discrétion de l'employeur après qu'ils aient répondu à une demande de justification de celui-ci."
Daw Khaing Zar explique qu'en droit du travail du Myanmar, un contrat d'emploi est résilié temporairement pendant une grève, ce qui veut dire qu'un employeur ne peut pas licencier des travailleurs pour motif de grève. Les travailleurs peuvent être poursuivis pour action de grève et ne peuvent être licenciés qu'après avoir été reconnus coupables.
"C'est le principe de la présomption d'innocence, ce qui veut dire que le Conseil d'arbitrage a enfreint la législation du travail."
Actuellement, au Myanmar, les travailleurs ne jouissent pas de la liberté syndicale et du droit de faire grève s'il n'existe pas de syndicat dans leur entreprise. L'incident de Thong Thai Textile illustre une situation dans laquelle des travailleurs se mobilisent avant la formation d'un syndicat, s'exposant ainsi aux représailles d'un employeur.
La Secrétaire régionale d'IndustriALL Annie Adviento a exhorté l'entreprise à respecter les droits fondamentaux des travailleurs et à réintégrer tous les 260 travailleurs.
"Il faut qu'un syndicat d'entreprise se crée immédiatement et soit reconnu par l'employeur pour régler les conflits du travail".