19 juin, 2024Les syndicats argentins condamnent l’adoption par le Sénat du projet de réforme qui, selon eux, portera atteinte à la souveraineté, réduira les droits du travail et laissera les générations futures sans perspectives.
Après un débat long et passionné, le Sénat argentin a adopté le 12 juin le projet de réforme connu sous le nom de “Loi pour les bases et les points de départ de la liberté des Argentins”. Le jour du vote, des milliers de travailleurs se sont rassemblés devant le Congrès national pour demander aux sénateurs de voter contre le projet de loi, qui va à l’encontre des intérêts du peuple argentin.
Dans une réponse brutale du gouvernement, six députés de l’opposition se sont retrouvés à l’hôpital après avoir été aspergés de gaz poivré. Des gaz lacrymogènes ont également été utilisés contre les manifestants pacifiques.
Les journalistes et les manifestants ont été repoussés par des balles en caoutchouc et plus de 200 personnes ont dû recevoir des soins médicaux. Au moins 36 personnes ont été arrêtées, emprisonnées et accusées de sédition et de terrorisme, des chefs d’accusation passibles de lourdes peines de prison, un autre signe clair que les manifestations ont été criminalisées par la ministre de la sécurité nationale, Patricia Bullrich.
Le projet de loi avait déjà été adopté par la Chambre des députés et devait encore être approuvé par le Sénat. Au cours du débat, les sénateurs ont apporté quelques amendements et le projet de loi va maintenant retourner à la chambre basse pour que ces amendements soient approuvés, avant qu’il soit promulgué par le gouvernement. Si les deux tiers de la Chambre des députés votent pour le rejet des amendements, le texte original, qui est encore plus préjudiciable aux travailleurs, deviendra loi.
Avant l’annonce du résultat du vote, les représentants syndicaux ont lu une déclaration préparée par les organisateurs de la manifestation, selon laquelle le projet de loi encourageait des politiques qui éroderaient le pouvoir d’achat des travailleurs, détruiraient les capacités de production, créeraient du chômage et réduiraient à néant les progrès accomplis en faveur de la création de relations de travail plus équitables.
Le projet de loi adopté par le Sénat donne au président le pouvoir, pour une période d’un an, de réformer ou d’adopter des lois sans passer par le Congrès. Pour les syndicats, il s’agit d’une violation de la Constitution du pays et du principe républicain de la séparation des pouvoirs.
Les sénateurs ont également raccourci la liste des entreprises publiques que le gouvernement peut privatiser et réduit le nombre d’agences publiques qu’il peut fermer. Toutefois, le gouvernement pourra toujours vendre un certain nombre d’entreprises publiques.
Les sénateurs ont également approuvé le régime d’incitation aux grands investissements (RIGI), qui, selon les syndicats, inondera le pays de capitaux étrangers et multinationaux sans aucun contrôle de l’État et permettra l’exploitation de ressources publiques et naturelles stratégiques, ce qui entraînera une désindustrialisation accrue.
La réforme de la sécurité sociale a également été adoptée. Elle a été condamnée par les syndicats parce qu’elle créera davantage de travail informel, réduira la couverture sociale et augmentera l’âge de la retraite pour les femmes.
Le Secrétaire régional d’IndustriALL, Marino Vani, a déclaré :
“C’est une honte et un affront à la démocratie, aux électeurs et au peuple argentin. Les partisans de la démocratie dans le monde entier devraient s’alarmer du fait que le président argentin se soit vu accorder des pouvoirs aussi étendus pendant un an.
Le projet de loi a été adopté à une voix près, ce qui signifie que le gouvernement Milei ne dispose pas d’une large majorité. Nous sommes solidaires du peuple argentin qui lutte et nous continuerons à soutenir nos affiliés dans leur combat pour l’abrogation de ces lois.”