18 juin, 2020L’Uruguay a été le premier pays au monde à ratifier la convention n° 190 de l’Organisation internationale du travail (OIT) visant à mettre fin à la violence et au harcèlement dans le monde du travail. Les syndicats affiliés à IndustriALL ont joué un rôle de premier plan dans la ratification de cette convention.
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La nouvelle convention et la recommandation visant à mettre fin à la violence et au harcèlement dans le monde du travail ont été adoptées lors de la Conférence internationale du travail de l’OIT, en Suisse, en juin 2019. Elle reconnaît que la violence et le harcèlement constituent une menace pour l’égalité des chances et sont inacceptables et incompatibles avec le travail décent.
Le gouvernement de l’ancien Président uruguayen, Tabaré Vásquez, a présenté l’initiative au Parlement en septembre et la Chambre des représentants l’a approuvée à l’unanimité le 17 décembre 2019.
Lors d’une cérémonie virtuelle le 12 juin 2020, Ricardo González Arenas, Ambassadeur et Représentant permanent de l’Uruguay auprès de l’Organisation des Nations unies à Genève, a déposé l’instrument de ratification auprès du Directeur général de l’OIT, Guy Ryder.
L’Uruguay est ainsi devenu le premier État membre de l’OIT à ratifier la C190.
L’Uruguay dispose d’une législation qui couvre certaines des questions abordées dans la C190, ce qui a contribué à sa ratification. Par exemple la loi n° 18561 sur le harcèlement sexuel, sa prévention et ses sanctions sur le lieu de travail et concernant les relations entre étudiants et enseignants ainsi que la loi n° 19580 sur la violence sexiste à l’égard des femmes.
Ana Aguilera, membre du Secrétariat pour le genre, l’égalité et la diversité de la centrale syndicale uruguayenne PIT-CNT, indique :
“Notre Secrétariat travaille depuis de nombreuses années sur le harcèlement sexuel au travail et sur la violence sexiste à l’égard des femmes. Il y a 15 ou 20 ans, nous avons travaillé en coordination avec les parlementaires pour soumettre une proposition de loi sur le harcèlement sexuel au travail et au niveau de l’éducation, par l’intermédiaire d’une commission tripartite. La loi n° 18561 a été promulguée en 2009 et depuis lors, le nombre de plaintes pour harcèlement sur le lieu de travail reçues par le ministère du travail a augmenté.
La loi n° 19580, promulguée en 2017, comporte un chapitre qui définit ce qui est considéré comme de la violence et y inclut les femmes qui souffrent de harcèlement au travail. Cette loi a également permis de rendre plus facile la dénonciation et le dépôt de plaintes concernant ces problèmes.”
Aguilera explique que, sur base de cette législation, une campagne a été menée avec succès en Uruguay en faveur de la ratification de la Convention 190 de l’OIT. Elle a consisté en une campagne unie des syndicats qui font partie du PIT-CNT, du ministère du travail, du gouvernement, des organisations de femmes et des centrales syndicales de la région.
Grâce à la ratification de la nouvelle convention, l’Uruguay devra également adopter une approche inclusive, intégrée et sensible à la dimension de genre pour prévenir et éliminer la violence et le harcèlement au travail. Cette approche s’appliquera aux secteurs public et privé, à l’économie formelle et informelle, tant en zones urbaines que rurales.
En outre, cette législation doit exiger des employeurs qu’ils prennent des mesures appropriées pour prévenir la violence et le harcèlement dans le monde du travail.
Les syndicats se battent pour un monde du travail sans violence ni harcèlement
Par l’intermédiaire du Bureau pour le genre, l’égalité et la diversité du PIT-CNT, les affiliés d’IndustriALL en Uruguay ont participé activement aux précédents pourparlers tripartites sur la ratification de la convention.
Marcelo Abdala, Secrétaire général du PIT-CNT et du Syndicat national des travailleurs de la métallurgie et des branches connexes, déclare :
“Après la conférence internationale de l’OIT où la C190 a été adoptée, le gouvernement précédent a convoqué une réunion tripartite où les femmes déléguées du PIT-CNT ont agi pour qu’elle soit rapidement traduite dans la législation. Le gouvernement Vázquez a voté en sa faveur, de concert avec le mouvement syndical et les employeurs se sont abstenus. Le PIT-CNT a organisé des ateliers pour expliquer le contenu de la Convention et pourquoi il était important que les syndicats l’utilisent comme outil. Les syndicats affiliés à IndustriALL en Uruguay y ont participé activement.
Nous sommes heureux que l’Uruguay soit devenu le premier pays au monde à ratifier la Convention et à l’inclure dans sa réglementation nationale. Pour nous, tout ce qui peut accroître la sensibilisation et promouvoir l’éradication des différentes composantes du harcèlement, tant sexuel qu’au travail, est une victoire pour la démocratie.”
Fernanda Ceballos, membre du Bureau pour le genre, l’égalité et la diversité du PIT-CNT et de l’UNTMRA, ajoute :
“Nous travaillons depuis longtemps sur la question du harcèlement sexuel et de la tolérance zéro envers la violence sur le lieu de travail et nous organisons des ateliers pour sensibiliser les syndicats à cette question. Nous travaillons également sur des clauses relatives au genre au sein des conventions collectives, en collaboration avec les entreprises et le ministère du travail. Après avoir ratifié la C190, nous avons organisé des réunions avec l’UNTMRA pour informer les gens de sa portée. Un grand nombre de travailleuses ont été confrontées au harcèlement sexuel au travail, c’est pourquoi nous pensons que la ratification est très importante pour lutter pour un monde du travail sans violence.”
Le Syndicat des travailleurs de la tannerie aussi bien que la Fédération des travailleurs du papier et du carton d’Uruguay comptent toutes deux peu de femmes parmi leurs adhérents, car les entreprises où ces organisations sont présentes n’ont pas de femmes parmi le personnel.
Cependant, les deux syndicats soutiennent les politiques favorisant l’égalité des genres et font pression pour que les hommes et les femmes jouissent des mêmes droits dans leurs conventions collectives.
Washington Cayaffa, Secrétaire général du FOPCU, a déclaré :
“Notre secteur se caractérise par l’absence d’une importante main-d’œuvre féminine dans les usines de fabrication. Il y a davantage de femmes au niveau du personnel de bureau, mais nous n’avons pas réussi à en syndiquer beaucoup.
Dans notre convention collective, il y a un point où nous demandons l’application de politiques visant à protéger l’égalité des droits pour les femmes sur le lieu de travail. La ratification de la convention C190 est l’une des politiques que nous soutenons.
Notre Fédération encourage les syndicats affiliés à défendre les droits des femmes en matière d’égalité. Par exemple, ils doivent soutenir la même définition du salaire afin que les travailleuses gagnent le même salaire qu’un homme effectuant le même travail”.
“Il n’y a pas beaucoup de femmes dans l’industrie du cuir, mais certaines d’entre elles ont assisté aux réunions du Bureau pour le genre du PIT-CNT pour discuter de la manière de soutenir la ratification de la C190”,
indique le Secrétaire général de l’UOC, Carlos Bico.
“Actuellement, cinq pour cent de la main-d’œuvre de nos usines sont des femmes. Dans la convention collective des Conseils salariaux, structurée par branche d’activité, l’UOC a proposé d’intégrer davantage de femmes dans le personnel des tanneries.”
Manifestation Uruguay
Le travail dans l’unité des syndicats uruguayens
L’UOC, l’UNTMRA et la FOPCU sont parmi les plus anciennes organisations syndicales d’Uruguay. Leurs origines remontent respectivement à 1904, 1953 et 1958. Ensemble, elles font partie de la centrale syndicale PIT-CNT.
Comme ils appartiennent à la même centrale, ces syndicats travaillent ensemble depuis de nombreuses années pour soutenir des objectifs communs. Par exemple, ils ont mené avec succès une campagne pour que l’Uruguay se retire de l’Accord sur le commerce des services (ACS) et une autre contre un plébiscite qui visait à abaisser l’âge de la responsabilité pénale de 18 à 16 ans.
Actuellement, ces trois syndicats font partie d’un projet appelé “Industrie intégrée”. Pendant deux ans, ils analyseront l’actuelle révolution scientifique et technologique et élaboreront des propositions pour stimuler l’emploi, la croissance des activités productives et la création d’une politique industrielle durable. Les syndicats travailleront aux côtés des gouvernements et des entreprises pour négocier des politiques publiques et privées qui permettent une transition juste, le renforcement de l’industrie nationale et la garantie d’emplois décents.