11 mai, 2023Au premier anniversaire de l'installation du président Yoon, le Conseil des Global Unions (CGU), qui représente 200 millions de travailleurs dans le monde, exprime ses vives préoccupations devant les récentes attaques, le harcèlement judiciaire et les ingérences dirigés contre les activités légitimes des syndicats et les droits des travailleurs en Corée du Sud.
Une poursuite de cette répression est inacceptable dans un pays qui est entré à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et qui a ratifié, il y a deux ans, la convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur la liberté syndicale et la convention n° 98 sur le droit de négociation collective.
Le 1er mai, Yang Hoe-Dong, responsable de district du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KCWU), s'est immolé par le feu pour protester contre le harcèlement des syndicalistes par les autorités gouvernementales. Il était une des victimes de ce harcèlement et a malheureusement péri des suites de ses brûlures.
Avant de passer à l'acte, Yang Hoe-Dong avait laissé un message disant que, bien qu'il ait mené ses activités syndicales dans la légalité, il a été inculpé pour obstruction à la conduite d'une entreprise, coercition et extorsion. Son immolation par le feu rappelle les années sombres de l'histoire du mouvement syndical en Corée du Sud.
Ces fausses accusations de coercition et d'extorsion portées contre des syndicalistes sont le fruit de la politique antisyndicale du gouvernement du président Yoon Seok-youl, qui recourt à la police plutôt qu'au dialogue social dans les relations du travail. Dans le secteur de la construction, la police a ouvert une enquête spéciale visant les syndicats, dans le seul but de criminaliser des activités syndicales normales. Après les propos hostiles aux syndicats tenus par le président, dans lesquels il comparait les syndicats de la construction à des organisations criminelles, la police utilise cet argument pour salir les syndicats et ruiner la réputation de leurs dirigeants. Yang Hoe-Dong était un des 950 responsables syndicaux convoqués par la police au cours de l'enquête spéciale dont 16 sont actuellement détenus sur de tels chefs d'inculpation.
La répression des syndicats par le gouvernement ne se limite pas au secteur de la construction, les définitions limitatives de la législation du travail permettant chaque jour de réprimer au pénal les activités des syndicats. À titre d'exemple, une grève des camionneurs a été déclarée illégale en novembre 2022. Daewoo Shipbuilding and Marine Engineering (DSME) ont mené un procès à 47 milliards de wons (environ 35,6 millions $ ou 32,3 millions €) contre cinq dirigeants syndicaux pour non-respect des objectifs de production pendant une grève. Il s'agit clairement de représailles destinées à dissuader les travailleurs de sous-traitants d'exercer leurs droits syndicaux fondamentaux.
Malgré les recommandations incontestables de l'OIT, des institutions gardiennes des traités des Nations unies et du Groupe d'experts constitué dans le cadre de l'accord de libre-échange avec l'UE, le gouvernement continue à bloquer tout amendement de la Loi d'adaptation sur les syndicats et les relations du travail qui l'alignerait sur les normes internationales.
En outre, l'administration Yoon a lancé une campagne de dénigrement systématique des organisations syndicales reposant sur des allégations infondées de corruption et d'irrégularités administratives. Le CGU est vivement préoccupé par le fait que les autorités s'ingèrent dans la gestion et les activités des organisations syndicales, réclamant la présentation de leurs budgets et des amendements à leurs statuts. Il s'agit là de violations graves du droit à la liberté syndicale défendu par la convention 87 de l'OIT.
Les diatribes du président Yoon Seok-youl contre les syndicats et son utilisation illégitime du ministère public et de la police pour s'en prendre à eux ont donné un ton au niveau national qui trouve un écho un peu partout sur le terrain, dans les lieux de travail, avec des agressions violentes de syndicalistes. Le 4 mai, un directeur d'ILJIN Hysolus, un fournisseur de Hyundai Motor et BMW, a foncé avec sa voiture sur des dirigeants du syndicat local, en renversant trois et blessant grièvement son vice-président.
Le CGU condamne la criminalisation de l'activité syndicale et les perquisitions des bureaux des syndicats par l'administration Yoon. Nous appelons le gouvernement sud-coréen à honorer ses engagements internationaux, à respecter totalement la liberté syndicale et le droit de négocier collectivement, et à mettre un terme à la répression du mouvement syndical sud-coréen.
Le CGU exige la libération des travailleurs emprisonnés pour avoir exercé leurs droits syndicaux fondamentaux et l'abandon de toutes les charges retenues contre eux. Nous exhortons aussi le gouvernement à cesser tous les actes de diffamation et de criminalisation envers des syndicalistes, lesquels ne sont pas propices à l'instauration de relations du travail stables mais suscitent plutôt un climat de crainte et d'intimidation hostile aux travailleurs dans l'exercice de droits protégés par la législation nationale et les lois internationales.
L'organisation est un droit, pas un crime.
Le CGU est aux côtés du mouvement syndical sud-coréen dans le combat qu'il mène pour la liberté et la justice. Il adresse ses condoléances à l'épouse et aux enfants de Yang Hoe-Dong ainsi qu'à sa famille syndicale.