30 mai, 2024Les menaces pesant sur la liberté syndicale, le droit de grève, les guerres en cours et la syndicalisation ont été quelques-unes des questions à l’ordre du jour de la réunion du Comité exécutif d’IndustriALL qui s’est tenue à Genève ces 23 et 24 mai.
Dans son premier discours d’ouverture en tant que première femme Présidente d’IndustriALL, Marie Nilsson, du syndicat suédois IF Metall, a rappelé à l’Exécutif que même si des défis tels que les changements technologiques, les guerres, les menaces pour la démocratie, le changement climatique et l’intelligence artificielle peuvent parfois passer pour des thèmes rabâchés, il est important que les syndicalistes continuent d’en parler jusqu’à ce que les travailleurs et travailleuses se sentent en sécurité dans la transition. Elle a souligné qu’il n’y a pas de force plus puissante pour la démocratie, la liberté et la durabilité que des travailleurs et travailleuses regroupés au sein de syndicats libres et démocratiques.
“La syndicalisation est notre tâche la plus importante. Dans toutes les usines, dans toutes les mines, dans toutes les blanchisseries, il faut demander à nos camarades s’ils veulent rejoindre le syndicat. La réponse sera oui, dans tous les lieux de travail. Il n’y a rien de plus important pour nous, car un faible niveau de syndicalisation nous pose problème. Une attaque contre vos droits est une attaque contre les miens. C’est la base de notre fédération et le fondement de notre solidarité”,
a déclaré Marie Nilsson.
La Vice-présidente nouvellement élue Christiane Brenner, du syndicat allemand IG Metall, a souligné l’importance de la liberté syndicale :
“La chose la plus précieuse que nous ayons est la liberté syndicale mais la tendance anti-syndicale est claire pour nous. Nous ne pouvons pas tolérer que des entreprises luttent contre notre droit fondamental”.
Le Comité exécutif a mis l’accent sur les points chauds de la planète en matière de droits des travailleurs et de violations syndicales, notamment en Ukraine, où le gouvernement utilise la guerre comme prétexte pour affaiblir le droit du travail et abandonner le dialogue social. En Argentine, la réforme du travail du Président Milei propose d’éliminer les droits fondamentaux du travail et les droits sociaux. Au Myanmar, grâce à la pression d’IndustriALL, de nombreuses grandes marques s’approvisionnant au Myanmar ont quitté ou sont en train de quitter le pays. Les discussions concernant le mépris permanent de la Biélorussie pour les droits des travailleurs et l’arrestation d’innombrables syndicalistes se poursuivront lors de la Conférence internationale du travail de cette année, qui débutera le 3 juin.
En ce qui concerne le droit de grève, le Secrétaire général d’IndustriALL, Atle Høie, a déclaré :
“Le droit de grève est ancré dans le droit international. Pourtant, depuis près d’une décennie déjà, les représentants des employeurs ont jeté le doute sur ce droit essentiel au sein de l’OIT. À la fin de l’année dernière, la Cour internationale de justice a été saisie de l’affaire.
Bien que nous soutenions la cause et que nous soyons convaincus que l’issue sera favorable aux travailleurs, nous n’avons pas besoin d’un tribunal pour confirmer que le droit de grève est fondamental pour que les travailleurs bénéficient d’un traitement équitable et d’une démocratie sur le lieu de travail.”
L’exécutif a également pris connaissance de l’avancée pour l’industrie du textile et de la confection au Cambodge, IndustriALL signant des accords juridiquement contraignants avec des enseignes de stature mondiale, ce qui permet pour la première fois d’obtenir des conventions collectives soutenues par des marques dans le secteur.
“Il s’agit d’une avancée significative, soutenue par les syndicats cambodgiens, qui apportera un développement durable à tous les acteurs de l’industrie. L’accord responsabilise tout le monde et favorise le dialogue social, ce qui se traduira par une compétitivité accrue, de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail”,
a déclaré Athit Kong, Président du CCAWDU.
Shawn Fain, Président de l’UAW, a remercié IndustriALL pour le soutien apporté lors des campagnes de recrutement syndical chez Volkswagen et Mercedes-Benz.
“La classe ouvrière a été laissée pour compte. Nous devons négocier de bonnes CCT et la syndicalisation suivra.”
Ilvana Smajlovic, Coprésidente du Comité des femmes, a déclaré que des plateformes telles que le Comité des femmes permettaient de soulever des questions comme la ménopause, l’intelligence artificielle et les négociations collectives, qui ont un impact considérable sur les femmes.
L’IA devrait avoir un impact massif sur les travailleurs et travailleuses ainsi que leurs syndicats. Le groupe d’experts 4.0 d’IndustriALL se concentrera sur l’élaboration de procédures qui participeront au développement de politiques liées à la numérisation et à l’IA. Le groupe se pernchera également sur la création de ressources, ce qui inclut l’élaboration d’un document politique pratique qui aborde la gestion des algorithmes et la confidentialité des données, les compétences et la requalification, la santé et la sécurité au travail, la redistribution des richesses et la productivité ainsi que la syndicalisation. Le Comité mondial des multinationales, anciennement appelé Comité d’orientation des multinationales, a entamé son évaluation de la mise en œuvre et du suivi des ACM et du renforcement des réseaux syndicaux.
Le Comité exécutif de juin 2023 a accepté de coopter des jeunes en tant qu’observateurs pour les futures réunions du Comité exécutif jusqu’au congrès de 2025. Laya Borjal Ferrer, du syndicat ALU-TUCP des Philippines, a déclaré :
“Merci d’avoir permis aux jeunes de participer au CE. Il est important que des jeunes participent aux débats sur l’IA, car notre génération sera très affectée.”
Afin d’affronter le capital mondial et de construire un syndicalisme fort et militant au plan mondial, le Comité exécutif a décidé de débloquer des fonds, sur une période de trois ans, pour la formation à la syndicalisation et à l’exécution de campagnes auprès des entreprises.
IndustriALL reçoit une grande partie du financement de ses projets de la part de donateurs externes. Cependant, en raison de la guerre en Ukraine, de la situation politique dans de nombreux pays donateurs ainsi que des fluctuations des taux de change, le financement des projets d’IndustriALL a diminué. Le Comité exécutif a décidé qu’IndustriALL puisse faire des demandes de financement auprès de donateurs traditionnels, d’agences nationales et internationales, d’entreprises et d’organisations philanthropiques si le financement est considéré comme correspondant aux objectifs d’IndustriALL et si le donateur est considéré comme ne prêtant pas à controverse.
Le Comité exécutif a adopté deux résolutions ; l’une sur la Corée du Sud appelant le gouvernement coréen et l’Assemblée nationale à réviser la loi pour mettre en œuvre les Conventions fondamentales 87 et 98 de l’OIT, et l’autre sur la Palestine : nous sommes du côté de la paix et de la justice.