14 mai, 2018Deux usines implantées à San Luis de Potosi, l’un des principaux centres industriels du Mexique, fabriquent des pneus pour de grandes multinationales: Continental Tire et Goodyear. Bien que quelques kilomètres seulement les séparent, leur mode de fonctionnement ne peut pas être plus distant en raison principalement de leur différence en matière de représentation syndicale.
Actuellement, les travailleurs de Goodyear sont « représentés » par le tristement célèbre sénateur Tereso Medina, un dirigeant syndical de la Confederación de Trabajadores de México (CTM) connue pour signer des « contrats de protection » avec les employeurs à l’insu des travailleurs.
Francisco Javier Cuestas, jeune opérateur employé à l’usine, a raconté:
Nous n’avons jamais vu ces soi-disant représentants. Ils ne savent rien de nous. Comme nous n’avons personne pour prendre la parole en notre nom, l’entreprise peut payer en toute impunité de très bas salaires – moins d’un dollar et demi par heure – pour un travail très dangereux et difficile.
Les conditions sont si mauvaises que l’entrée s’est transformée en une porte tournante. Pablo Reyes Medina Hernández, également employé dans cette usine, a indiqué:
Cela n’a pas de sens. L’entreprise investit considérablement dans la formation, mais les travailleurs nouvellement recrutés s’en vont après quelques semaines seulement parce que le travail est tellement mauvais. Ce n’est pas comme si Goodyear ne pouvait pas se permettre de payer des salaires décents et d’offrir de bonnes conditions de travail. Il le fait ailleurs, alors pourquoi pas ici?
Après avoir lu un article dans un journal sur la manière dont les syndicats indépendants représentant les travailleurs chez Audi, Bombardier, Bridgestone, General Tire, Nissan et Volkswagen se sont unis dans le cadre d’une initiative menée par IndustriALL pour protéger les droits des travailleurs dans le secteur automobile, les jeunes travailleurs ont décidé qu’il était temps que les choses bougent. Aussi, lorsque la compagnie a refusé d’écouter, ils ont arrêté de travailler pour revendiquer leur droit à une véritable représentation syndicale.
A l’usine de pneumatique Continental, située non loin, les choses sont très différentes. Federico González, Secrétaire général du syndicat indépendant à l’usine, SNTGTM, affilié à IndustriALL, a souligné:
Nous faisons le même travail, en utilisant la même technologie. Nous avons un syndicat démocratique qui participe aux négociations. Aussi, nous avons de biens meilleurs salaires et conditions de travail, ainsi qu’une main d’œuvre stable et motivée. Nous travaillons tous pour des compagnies de classe mondiale. Il n’y a donc pas de raison pour qu’ils gagnent beaucoup moins que nous. C’est aussi pour ça que nous les soutenons dans leur lutte.
IndustriALL et certains de ses affiliés, dont des membres à Goodyear ou à sa chaîne d’approvisionnement, y compris le Syndicat des Métallos (USW) aux USA et au Canada, et CNM-CUT au Brésil, ainsi que d’autres syndicats indépendants au Mexique, ont écrit à la compagnie pour lui demander de respecter le droit fondamental de ses travailleurs à former un syndicat de leur choix et d’honorer son engagement de ne prendre aucune mesure de répression contre les grévistes.