19 décembre, 2012Dans la construction-destruction des navires, le cycle de vie des navires et les emplois durables sont au centre des préoccupations des travailleurs et travailleuses
Le groupe d’action de IndustriALL Global Union sur la construction navale s’est réuni les 19-20 novembre à Rio de Janeiro, Brésil, à l’invitation de la CNM-CUT. Vingt-six participant(e)s du Brésil, du Chili, du Danemark, de France, d’Inde, du Japon, de Corée du Sud, des Pays-Bas et de Norvège ont examiné avec attention les points suivants de l’ordre du jour:
- Prévision des tendances à venir dans les industries de la construction et de la destruction des navires
- Sécurité et santé au travail, syndicalisation et lutte contre l’emploi précaire
- Promotion d’une industrie et de lieux de travail durables
- Coopération en vue d’obtenir une situation équilibrée dans le cycle de vie d’un navire
- Développement d’activités futures dans le cadre de IndustriALL Global Union
L’industrie mondiale de la construction navale fait face à une période de défis depuis la crise financière de 2008 responsable du ralentissement actuel dans l’industrie mondiale de la construction navale. La somme totale de travail inscrite sur les carnets de commandes des grands pays et régions de construction navale (Chine, Corée, Japon et Europe) montre qu’ils n’ont maintenant qu’environ deux années de charge de travail devant eux, s’ils maintiennent le niveau actuel de capacité des chantiers navals et de l’emploi. Dans le même temps, les postes de travail dans la construction navale se sont rapidement déplacés des grands pays de construction navale vers des pays émergeants comme le Brésil, l’Inde, les Philippines et le Viêt-nam.
Le Brésil emploie maintenant 200.000 travailleurs/euses dans la construction navale (40.000 directement et 160.000 indirectement). Il s’agit d’une augmentation de plus de 260% depuis 2002 à la suite de la politique de revitalisation industrielle décidée par le gouvernement Lula/Dilma. Le syndicat fait face à des défis tels que la liberté d’organiser des comités syndicaux sur des lieux de travail et l’extension des conventions collectives à la main-d’œuvre en sous-traitance, comme l’a mentionné notre camarade Edson Carlos da Silva du CrM-CUT.
Il y a actuellement au Brésil un système tripartite de discussions dans l’industrie de la construction navale, entre le syndicat, l’association patronale et le gouvernement. Nous voudrions nous servir de ce système pour assurer le respect des droits syndicaux et la présence d’emplois durables, notamment dans les technologies avancées, et une formation destinée à améliorer les compétences des travailleurs et travailleuses.
Les membres du groupe d’action ont partagé des concordances de vues sur le fait que dans les industries de construction navale et de destruction des navires, les emplois sont précaires et dangereux dans de nombreuses régions. En Corée, un mouvement de travailleurs/euses dans la construction navale se bat pour obtenir le traitement et la prévention des troubles musculosquelettiques (TMS) dans le cadre du combat mené pour un travail sans risque de blessure ou de maladie. Dans la crise économique actuelle, les travailleurs/euses de la construction navale en Corée ont résisté quand des entreprises ont tenté de faire porter tout le fardeau par les travailleurs/euses, comme ce fut le cas l’année dernière avec la lutte menée à Hanjin qui a permis d’obtenir la réintégration de tous les travailleurs. Le camarade HONG, Ji-Wook, du KMWU a demandé à IndustriALL de prévoir une plus large participation au groupe de travail qui soit le reflet de la main-d’œuvre employée dans les industries de construction navale et de destruction des navires. Il a également demandé que les réunions à venir concernent des actions communes et une plate-forme de solidarité pour traiter de questions urgentes comme la croissance mondiale de l’emploi précaire dans la construction/destruction des navires et la défense des travailleurs et travailleuses dans la crise.
Dans la région Asie du Sud, l’Inde, le Bangladesh et le Pakistan représentent près de 70% du tonnage brut mondial de destruction des navires, et l’on estime que plus de 120.000 démolisseurs de navires travaillent au contact de matériaux dangereux sans avoir une connaissance réelle des questions de santé et de sécurité au travail et des droits fondamentaux de la main-d’œuvre. Le camarade V.V. Rane, SMEFI, qui a joué un rôle important dans la syndicalisation de plus de 10.000 démolisseurs de navires en Inde au cours des 9 dernières années dans le cadre du projet de syndicalisation FIOM-FNV, a expliqué ce qu’est la véritable vie des démolisseurs de navires en Inde et indiqué l’importance de l’action solidaire entreprise par les démolisseurs de navires. Le nouveau documentaire sur les démolisseurs de navires “The Wire Nest” réalisé par SMEFI, ISCOS et IndustriALL, a également été montré au groupe d’action, et le fascicule “Research on Spending Pattern of Ship Breaking Workers” a été remis à chaque participant. FNV Bondgenoten, qui a soutenu les démolisseurs de navires en Inde, a insisté sur le fait que les connaissances des personnes qui travaillaient il y a 30 ans dans la construction navale pourraient empêcher de nombreux accidents dont sont victimes les démolisseurs de navires.
Les travailleurs de la construction navale savent où se trouve le danger car ce sont eux qui ont construit ces navires dans le passé.
Co-industri, Danemark, a soulevé une question sur le recyclage de la ferraille qui n’intéresse pas seulement l’industrie de destruction des navires en Asie du Sud. Il y a des millions de travailleurs/euses partout dans le monde employés dans le recyclage dans différents secteurs.
Le secteur construction-destruction des navires a réussi à syndiquer des démolisseurs de navires, mais nous devons également penser aux autres secteurs comme l’automobile, l’aérospatiale et l’électronique.
Le groupe d’action a accepté de continuer à développer un lien stratégique entre les travailleurs de la construction navale et ceux de la destruction des navires, en tant que secteur unique, et dans le même temps, le groupe d’action a confirmé que tous les secteurs de la fabrication de IndustriALL devraient commencer à considérer la manière de contacter les travailleurs et travailleuses du recyclage qui ne sont pas syndiqués.
Des syndicats de France, du Japon et de Norvège ont souligné le besoin d’un développement durable pour protéger l’emploi dans la construction navale. Des possibilités importantes existent actuellement dans les chantiers navals pour diversifier leurs activités dans des vaisseaux et des structures offshore, et des navires utilisant des techniques écologiquement rationnelles en tant que sources alternatives d’énergie dans les océans ont été explorées, comme l’a mentionné le camarade Yakusue, JBU.
Il n’y aura presque plus de construction navale au Japon en 2014 si le carnet de commandes continue de se rétrécir, comme c’est le cas actuellement. Nous essayons très sérieusement de passer maintenant à des produits maritimes à forte valeur ajoutée pour utiliser nos chantiers navals existants et protéger 53.000 emplois.
Pour clore la discussion, le groupe d’action a décidé que les points suivants constitueraient des activités prioritaires en 2013:
- Poursuivre le suivi des conclusions de la Conférence mondiale FIOM-FEM sur des emplois sûrs, durables et verts dans la construction-destruction des navires en 2011
- Rechercher des activités connexes dans les secteurs de l’ingénierie mécanique, de la chimie, du pétrole et du gaz
- Aller à la rencontre des travailleurs et travailleuses qui ne sont pas syndiqués et assurer la promotion de la santé et la sécurité au travail, tant dans la construction que dans la destruction des navires
- Exiger la ratification le plus rapidement possible par les gouvernements de la Convention internationale de Hong Kong de l’OMI pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires
- Recommander que d’autres secteurs industriels commencent à examiner la possibilité d’aider les industries et les travailleurs/euses menant des activités de recyclage
- Mener une étude/recherche conjointe avec IndustriALL European Trade Union pour dresser la représentation des syndicats dans la construction/destruction des navires et déterminer les activités syndicales et les questions actuelles, notamment l’emploi précaire et le travail en sous-traitance
- Étendre la participation de syndicats représentant la main-d’œuvre avec une contribution importante à la construction navale mondiale dans de futures réunions
- Mettre en place une plate-forme de solidarité pour lutter contre la croissance de l’emploi précaire dans le secteur et défendre les droits des travailleurs et travailleuses dans la construction-destruction des navires
- Développer une coopération/collaboration avec des organisations internationales, telles que IndustriALL European Trade Union, la FIOT, le GT6 de l’OCDE, l’OIT, l’OMI, la Commission de l’UE et des ONG
- Rechercher la possibilité de négocier des ACM/créer un nouveau réseau dans des EMN de la construction navale
La présidence de ce secteur n’ayant pas reçu l’approbation du Comité central de l’ex-FIOM en décembre 2011, le groupe d’action a décidé de laisser le poste vacant jusqu’en 2014. La procédure élection/sélection du/de la président(e) fera l’objet d’une discussion et d’une décision à la réunion du groupe d’action en 2013, et l’élection aura lieu lors d’une Conférence en 2014. La prochaine réunion du groupe d’action se tiendra au Danemark.
Le 21 novembre, le groupe d’action a visité deux chantiers navals, Estaleiro Mauá et STX OSV, situés à Niterói dans l’État de Rio de Janeiro, une zone bien connue pour sa tradition dans la construction navale et située près des principaux bassins pétroliers du Brésil. Les participant(e)s ont appris que l’industrie pétrolière et gazière offshore est un stimulant pour des activités de construction navale et d’emploi spécialisées dans une production destinée à l’industrie pétrolière et gazière, comme des plates-formes offshore, des vaisseaux de forage et de pose de tuyaux