7 décembre, 2015Le monde de la fabrication industrielle est sur le point de subir un séisme. Selon certains, nous sommes en train de connaître une quatrième révolution industrielle qui va changer la manière dont les choses sont fabriquées. Et l’impact sur les travailleurs va être énorme.
Industrie 4.0 est un terme créé en Allemagne en 2011 pour décrire l’informatisation du secteur manufacturier considérée comme la quatrième révolution industrielle.
La première révolution industrielle, dès la fin du 18e siècle, a vu la naissance des manufactures où étaient utilisées des machines hydrauliques et à vapeur. La deuxième s’est produite au début du 20e siècle, lorsque les lignes de production ont été alimentées par l’électricité. La troisième est venue du passage d’une production analogique et mécanique vers des technologies électroniques et digitales à partir des années 1970.
La quatrième révolution industrielle, Industrie 4.0, a recours à de la technologie intelligente et à des données en temps réel pour accroître la productivité et réduire les coûts.
Dans les usines intelligentes, machineries, des systèmes de stockage et de production sont capables d’exécuter des tâches complexes, d’échanger des informations et de se transmettre des instructions, sans avoir besoin d’une intervention humaine.
S’exprimant au Forum économique mondial de Davos en janvier 2015, la Chancelière allemande Angela Merkel a décrit Industrie 4.0 comme la façon dont nous “établissons une convergence rapide entre l’univers numérique et le monde de la production industrielle.”
Industrie 4.0 dépend fortement de l’Internet des Objets, ceux-ci étant pourvus de technologie pouvant communiquer avec les systèmes IT et être détectés par des capteurs.
L’informatique en nuage (le ”cloud”) est également essentielle pour gérer les milliards de capteurs, d’appareils, de données ou d’information ainsi créés.
Les avancées en analyse de données font que de puissants logiciels ont la capacité d’interpréter toute cette information (les ”Big Data” ou mégadonnées) en provenance des systèmes de production en temps réel. Ceci offre des avantages immenses aux multinationales en leur donnant accès à la seconde même aux informations sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Cela permet également aux entreprises d’être plus réactives par rapport aux tendances du marché et d’avoir une meilleure planification grâce à des prévisions plus précises.
De plus, les évolutions en matière d’impression 3D ont le potentiel de réduire de manière draconienne les coûts de recherche et développement et même de se passer complètement de sites de production.
Mais qu’en est-il des travailleurs ?
La numérisation va sans nul doute créer de nouveaux emplois mais dans des secteurs différents. À mesure que les robots deviendront de plus en plus sophistiqués et que les machines se contrôleront les unes les autres, le besoin de main d’œuvre ne va-t-il pas diminuer ?
“Nous ne savons pas encore quel sera l’impact réel,” confie Christain Brunkhorst de notre affilié allemand IG Metall, qui s’exprimait sur le sujet lors de la récente réunion du Groupe de travail pour l’industrie automobile à Toronto. “Bien qu’il puisse y avoir quelques améliorations ergonomiques pour les travailleurs, puisque les tâches répétitives ou compliquées sont prises en charge par les robots, les travailleurs devront rapidement acquérir de nouvelles qualifications pour s’adapter aux usines intelligentes.”
Ce ne sont pas seulement les méthodes de production qui deviennent intelligentes dans le secteur automobile, les voitures connectées et autonomes pourraient encore transformer le secteur et la conduite en elle-même.
“Il pourrait y avoir de nombreux nouveaux postes hautement qualifiés dans les domaines de la planification, de la configuration et de la maintenance des nouvelles technologies, mais les ouvriers peu qualifiés pourraient y perdre,” indique Brunkhorst
La technologie et les systèmes intelligents pourraient aussi conduire à un contrôle et une surveillance du comportement et des performances des travailleurs. Les usines intelligentes impliquent de grandes attentes en matière de flexibilité individuelle et on s’attend à ce que le travail précaire s’accroisse.
IG Metall est en train de conscientiser les conseils d’entreprise à propos des changements qui se profilent et a mis en place des études pour en évaluer les conséquences sur le monde du travail. “A ce stade, en tant que syndicat nous essayons d’avoir une influence sur la transition au moment où ces nouvelles technologies prennent pied dans l’industrie automobile,” dit Brunkhorst.
Entretemps, le fabricant de l’iPhone, Foxconn, qui emploie 1,2 millions de travailleurs, a annoncé que des robots remplaceraient 30% de la main d’œuvre sur ses lignes de production d’ici à cinq ans.
Kan Matsuzaki, Directeur d’IndustriALL pour les TIC, l’électricité et l’électronique déclare :
Industrie 4.0 va s’introduire dans différents secteurs plus vite que nous n’aurions pu l’imaginer. Les syndicats doivent être préparés à un impact massif sur l’emploi, les conditions de travail ainsi que les droits des travailleurs et concentrer leurs actions sur une transition juste.