11 août, 2016Ces 8 et 9 août, les affiliés d’IndustriALL du Népal, du Bangladesh, d’Inde, du Pakistan et du Sri Lanka se sont rencontrés à Katmandou pour débattre de la manière de mettre en œuvre le programme d’IndustriALL sur l’emploi industriel durable au sein de leurs pays et de concevoir une stratégie régionale.
Les affilés des cinq pays ont relevé les impacts négatifs subis par les travailleurs en conséquence des politiques industrielles faibles ou inexistantes de leurs gouvernements. La politique industrielle a été déterminée par la politique économique et a failli à rencontrer les besoins du monde du travail, de la société et de l’environnement. La déréglementation et la sape des conditions des travailleurs ont été poursuivies pour attirer les investissements directs étrangers, en même temps que des vagues successives de privatisations ont affaibli la santé, l’éducation, la fourniture d’énergie et les services de transport qui sont nécessaires pour la promotion d’un emploi industriel durable. Les affiliés ont directement lié les échecs en matière de politique industrielle au remplacement de l’emploi permanent par le travail précaire.
Les syndicats ont pointé des problèmes spécifiques au plan national. Au Pakistan, le gouvernement a annoncé une politique industrielle en 2015 mais, alors que la politique elle-même est bonne, son application est nulle. Au Bangladesh, les coupures de gaz et d’électricité rendent difficile la mise en place de politiques industrielles alors qu’au Népal, les syndicats se débattent avec la gestion des séquelles du tremblement de terre de l’année dernière.
L’Inde est lourdement dépendante du charbon pour sa production électrique et fait face à un impact important de l’Accord de la COP de Paris, avec des investissements dans le secteur pour l’instant en suspens. Il existe un besoin énorme de développer les compétences alors que de nombreux jeunes des régions rurales sont sans formation et dès lors inemployables.
Les syndicats ont analysé la manière dont les politiques destinées à attirer les investissements et développer les industries impactent négativement les droits des travailleurs et l’environnement du fait que ces problématiques ne sont pas prises en compte lors de leur conception. L’impact le plus marquant l’a été sur la liberté syndicale et la négociation collective ainsi que sur l’externalisation et le travail précaire. On a recherché de la main d’œuvre bon marché et favorisé les bas salaires pour assurer de plus gros bénéfices. Au Bangladesh, lorsque le logement n’est pas pris en compte de manière adéquate, les travailleurs et travailleuses finissent par croupir dans une surpopulation sordide et exploités par leurs logeurs.
Il n’y a pas eu de planification adéquate au niveau de l’exploitation minière et industrielle avec pour résultat que des autorisations pour des projets industriels sont données sans réelle analyse des impacts sur l’environnement. En Inde, cela s’est traduit par des situations où il est permis aux industries de pomper et assécher les nappes phréatiques, de polluer l’air et de contaminer les eux souterraines par l’enfouissement de déchets. L’investissement y est conçu pour bénéficier aux entreprises, pas au pays.
Les affiliés font face à un défi énorme s’agissant d’influencer la conception des politiques industrielles en faveur d’un emploi industriel durable, en particulier dès lors que les gouvernements n’écoutent que les entreprises et ne sont pas intéressés par le point de vue des syndicats. Ceux-ci vont devoir user de leur influence auprès des parlementaires locaux ainsi que des partis politiques sensibles au point de vue des syndicats et élaborer un message clair et une stratégie par rapport aux médias. Si la voix des syndicats n’est pas entendue, ils vont également devoir construire leur unité, accroître leurs effectifs et se renforcer financièrement par l’augmentation des cotisations syndicales.
Les étapes suivantes pour les affiliés des cinq pays consisteront à continuer à débattre de ces problématiques au sein de leurs propres organisations, avec les autres affiliés et avec les centrales nationales en ayant pour but de formuler des revendications concrètes autour d’un emploi industriel durable. Là où des organes consultatifs auprès des gouvernements existent, ces questions y seront mises à l’ordre du jour. Les syndicats des autres pays vont étudier les modèles de coopération syndicale au niveau national qui existent en Inde et au Népal.
Les affiliés du Sri Lanka vont continuer à faire pression sur le gouvernement en vue d’une politique industrielle durable dans le contexte de sa proposition de politique d’emploi qui, pour l’instant, ne prend pas en compte l’impact qu’aura l’évolution industrielle sur les travailleurs et l’environnement.
La réunion s’est conclue par un appel à la solidarité au niveau de l’Asie du Sud pour contrer les tentatives des gouvernements de saper les droits syndicaux au nom de la concurrence avec les autres pays de la région et pour travailler à une plus grande protection des travailleurs au niveau des traités commerciaux tant au sein de la région qu’avec d’autres pays.