21 mai, 2014Plus que jamais, IndustriALL Global Union aide les travailleurs à évoluer sur un terrain où les règles sont équitables. Par le renforcement de la capacité d’agir des syndicats locaux, leur incorporation dans des réseaux syndicaux mondiaux et en mettant en oeuvre ceux-ci pour appliquer des stratégies et des tactiques, IndustriALL mène des campagnes pour modifier l’équilibre des forces pour le faire revenir du côté des syndicats.
Campagnes
Texte: Adam Lee
Décembre 2013 est pour IndustriALL Global Union une date marquante pour le dialogue social. Des Accords-Cadres Mondiaux (ACM) ont été signés avec trois entreprises : SCA en Suède, Norske Skog en Norvège et Solvay en Belgique. Un jalon a été posé : il existe maintenant plus de 100 accords mondiaux entre les entreprises et les FSI.
Les ACM sont des accords écrits qui sont négociés à niveau mondial entre les Fédérations Syndicales Internationales (FSI), comme IndustriALL, et les entreprises multinationales. Lorsqu’ils sont rédigés et appliqués correctement, ces accords peuvent servir à protéger les droits des travailleurs sur tout site d’activité d’une entreprise sur la planète.
Cependant, ce jalon appelle aussi une question : que cela signifie-t-il pour les dizaines de millions de travailleurs et travailleuses employés par les milliers de multinationales qui n’ont pas signé d’accord mondial ? Par comparaison, décembre n’a pas été un bon mois pour les membres de l’affilié d’IndustriALL, le Syndicat des salariés des zones de libre échange et des services d’intérêt général (FTZGSEU), employés par Ansell dans la zone de libre échange de Biyagama au Sri Lanka. En décembre, ils en étaient à deux mois de grève et de nombreuses familles commençaient à désespérer.
La grève avait été précipitée par les abus de la direction d’Ansell contre les droits des travailleurs et de leurs syndicats. On peut citer le refus de négocier en toute bonne foi, la victimisation des dirigeants syndicaux, le versement de salaires de misère et même le fait de forcer les travailleurs à uriner sans quitter leur poste de travail pour maintenir un haut débit de production.
Contre-attaque
Bien que par certains aspects il s’agisse d’un cas extrême, des entreprises comme Ansell ne sont que trop répandues. Si les syndicats devaient oublier tous les Ansell de ce monde et concentrer leur attention sur les entreprises qui choisissent le droit chemin, le gagne-pain de la plupart des travailleurs et travailleuses serait en danger.
Historiquement, les syndicats ne sont pas apparus grâce à un dialogue harmonieux avec les employeurs. Ils ont vu le jour lorsque des travailleurs se sont associés pour exiger réparation pour les injustices de leurs employeurs. Que des travailleurs et leurs syndicats s’organisent et bâtissent unité et solidarité reste une composante vitale de toute contre-attaque face à l’injustice d’un employeur.
Cependant, confrontée à des entreprises multinationales géantes et des associations patronales puissantes, la syndicalisation d’un lieu de travail n’est bien souvent pas suffisante en elle-même. Les syndicats sur un site d’activité individuel tiennent souvent le mauvais bout dans l’équilibre des forces.
IndustriALL prend un rôle de plus en plus important dans des campagnes. Celles-ci peuvent être dirigées contre un seul employeur abusif, comme c’est le cas pour les campagnes récentes et encore en cours contre Ansell, Crown et Rio Tinto. Mais elles peuvent aussi viser plusieurs entreprises ou des associations patronales, comme au Bangladesh et au Cambodge.
La campagne Ansell
Ansell est un producteur d’origine australienne de gants médicaux et de préservatifs. Bien avant que le FTZGSEU n’appelle à la grève chez Ansell, IndustriALL avait répliqué aux atroces conditions de santé et sécurité de cette entreprise en fournissant une critique avisée de ces pratiques. Ceci a permis au FTZGSEU de mettre la pression sur les autorités réglementaires pour qu’elles se penchent davantage sur les pratiques en matière de santé et sécurité au sein de cette usine.
En octobre de l’année dernière, 294 travailleurs et travailleuses d’Ansell ont été licenciés alors qu’ils participaient à une grève, lancée au départ pour protester contre la mise à l’écart du président de leur section syndicale locale, mais qui a été avivée par le licenciement par Ansell de 11 militants et représentants syndicaux. Des tribunaux de premier instance ont statué en faveur de la réintégration des travailleurs licenciés et la Cour Suprême a ensuite ordonné à Ansell de négocier un règlement avec le FTZGSEU. Lorsque la direction a refusé de s’y plier, IndustriALL a accéléré sa campagne en envoyant une délégation de haut rang s’adresser à un meeting de grévistes dans le but d’amener un soutien au syndicat dans tous le pays.
Construire un soutien international est l’une des principales priorités de la campagne. A cette fin, nous avons une campagne LabourStart, qui a généré près de dix mille lettres de protestation à la direction d’Ansell. Le Comité exécutif d’IndustriALL a réagi avec une résolution ferme et un engagement de soutien fort de toutes les régions du globe.
IndustriALL a déposé une plainte auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) concernant les violations de ses principes directeurs. Ceux-ci prévoient des normes internationales pour les entreprises multinationales dans les domaines, notamment, de l’emploi, des droits de l’homme, de la santé et sécurité et de la corruption, assorties d’un mécanisme de dépôt de plainte.
Dès lors qu’Ansell a refusé les offres de dialogue d’IndustriALL à propos du conflit au Sri Lanka, le mécanisme de plainte auprès de l’OCDE permet à IndustriALL de mettre la pression sur Ansell afin, soit qu’elle reconsidère l’offre, soit qu’elle ait à faire face à un étalage public, potentiellement dommageable, de ses pratiques inhumaines.
En février, IndustriALL a encore accéléré sa campagne. Le Secrétaire général d’IndustriALL Jyrki Raina s’est rendu au Sri Lanka et a participé à un meeting de soutien aux grévistes. Il a également rencontré le Président du Sri Lanka pour faire part des préoccupations quant au conflit. Attirant une importante couverture médiatique, la visite de Jyrki Raina a permis de donner un coup de projecteur sur les pratiques inhumaines d’Ansell.
Le chemin de la victoire
La grève et la campagne ont eu un énorme impact. A peu près en même temps que la visite de Jyrki Raina, il a été révélé que de nombreux gants produits par Ansell étaient renvoyés comme défectueux. Il a également été annoncé que le Conseil pour l’Investissement du Sri Lanka avait rejeté la demande d’abattement fiscal d’Ansell Lanka en raison du conflit.
La direction d’Ansell n’a pas encore fait d’offre honorable pour résoudre le conflit. Lorsque la Cour Suprême du Sri Lanka s’est à nouveau penchée sur l’affaire le 3 mars, il était clair qu’Ansell n’avait aucune intention d’essayer de trouver une solution viable. La Cour Suprême a proposé la réintégration des 294 salariés, mais Ansell prétend avoir déjà pourvu aux postes vacants. Le Procureur Général a ordonné que le Tribunal du Travail du Sri Lanka connaisse de l’affaire, excepté pour 35 travailleurs qui ont reçu des indemnités de licenciement. S’il n’y a toujours pas de solution, la Cour Suprême rouvrira le dossier.
Comme la fin du conflit n’est pas en vue, IndustriALL va poursuivre la campagne et faire monter la pression sur Ansell de manière créative et stratégique et faire ce qu’il faut.
Pour les syndicats, le terrain est plus miné que jamais. Les directions des grandes entreprises repoussent les limites dans leur quête impitoyable de profits. Les entreprises européennes qui pratiquent le dialogue social au pays se déchaînent en attaques anti-syndicales en Amérique du Nord et ailleurs.
Le chemin de la victoire face à des employeurs abusifs ne sera pas une promenade de santé. IndustriALL va poursuivre ce chemin en renforçant sa capacité à mener des campagnes efficaces. Nous travaillons avec nos affiliés et avec d’autres Fédérations Syndicales Internationales pour tirer avantage de nos ressources et expériences communes.