26 février, 2016Fin janvier, IndustriALL Global Union et la Fédération nationale indienne des mineurs (INMWF) ont visité Chattarpur, dans l’état du Madhya Pradesh, en Inde, où Rio Tinto attend l’autorisation d’aménager une mine de diamants à ciel ouvert de 300 mètres de profondeur.
Selon Rio Tinto, une fois en activité, la mine Bunder placerait le Madhya Pradesh parmi les dix premières régions productrices de diamant dans le monde.
Pendant cette visite à Chattarpur, les villageois des communautés riveraines ont exprimé une forte opposition au développement du projet Bunder et leur mécontentement par rapport à Rio Tinto, en écho au résultat d’une consultation organisée par les autorités il y a un an. Selon les articles de presse parus sur le sujet, seul sept villageois ont soutenu le projet contre deux cent cinquante qui s’y sont opposés.
La communauté riveraine est préoccupée par la politique d’emploi de Rio Tinto, faisant écho en cela à ce qu’IndustriALL a rapporté dès le début de sa campagne Rio Tinto il y deux ans. L’entreprise emploie actuellement environ 400 personnes pour la phase de prospection de Bunder, la majorité d’entre elles étant recrutées par le biais d’un sous-traitant local.
Rio Tinto prétend sur son site internet qu’il accorde la priorité à l’emploi local et que 70% des travailleurs de Bunder proviennent des communautés riveraines. Cependant, au cours de la visite effectuée par IndustriALL et l’INMWF, les villageois et PEHAL, une ONG impliquée dans la défense des communautés riveraines, ont indiqué que seul un tiers des travailleurs provenaient réellement des villages environnants.
Rio Tinto déclare également que l’emploi local est organisé sur base de rotations de sorte à bénéficier à davantage de familles. En réalité, les villageois se plaignent de ne pas pouvoir travailler plus de quatorze journées par mois, avec un salaire minimum quotidien de 375 roupies (US$ 5,5) pour les travailleurs qualifiés et de 235 roupies (US$ 3,4) pour les non-qualifiés. Ces conditions ne permettent pas un niveau de vie décent. De plus, les travailleurs qui prospectent à Bunder peinent à la tâche douze heures par jour. On a par ailleurs rapporté que certains travailleurs ont été favorisés et ont reçu le statut de travailleur qualifié simplement pour avoir été favorables à l’ouverture de la mine.
Les villageois ont rapporté que lorsque des travailleurs ont essayé de s’organiser en syndicat afin d’avoir de meilleures conditions, ils ont tous été mis à la porte par les sous-traitants.
“Il est malheureux qu’une multinationale minière du gabarit de Rio Tinto, venue avec la promesse d’apporter emploi et développement aux communautés locales, exploite en réalité les travailleurs pauvres des tribus et nuit aux moyens de subsistance de ces communautés locales. L’INMWF condamne ces pratiques dirigées par Rio Tinto à l’encontre des travailleurs et va poursuivre son combat en vue de protéger les droits des travailleurs” indique S Q Zama, Secrétaire général de l’INMWF.
Rio Tinto semble avoir également brisé sa promesse envers la communauté riveraine. Dans l’un des villages visité par IndustriALL et l’INMWF, les habitants ont rapporté qu’au début du projet Bunder, Rio Tinto avait érigé un réservoir d’eau. Chaque famille a payé 1000 Roupies (US$ 15) pour être raccordée à la distribution d’eau ainsi que US$0,73 pour qu’un gardien s’occupe du réservoir. Cependant, lorsque les villageois ont commencé à se plaindre du projet minier, Rio Tinto a arrêté le système et emporté la pompe après seulement deux mois. Selon les habitants, l’entreprise a déclaré que tant qu’ils s’opposeraient au projet elle ne remplirait pas le réservoir d’eau. PEHAL a également indiqué que Rio Tinto avait renié sa promesse de planter des arbres fruitiers le long des chemins à proximité du projet.
Les conclusions de la visite effectuée par IndustriALL et l’INMWF ont montré que peu de choses ont changé depuis qu’un rapport publié par Partizans en 2013 avait critiqué l’attitude de Rio Tinto envers les travailleurs, l’environnement et les communautés riveraines de Bunder.
Le développement du projet Bunder n’est pas seulement confronté à l’opposition des communautés locales. Il y a aussi des fronts politiques et d’ONG pour dénoncer l’impact que ce projet pourrait avoir sur les moyens de subsistance de ces communautés. Selon certains rapports, plus d’un million d’arbres devraient être détruits si le projet devait aller de l’avant, causant une déforestation de grande ampleur et mettant à mal l’habitat et les déplacements de tigres constituant une espèce menacée. Il nécessiterait une quantité énorme d’eau dans une région qui connaît d’importantes sécheresses.
Le gouvernement du Madhya Pradesh a publié une lettre d’intention en 2012 qui donne un feu vert provisoire au projet. Mais avant que cette permission provisoire puisse être transformée en licence minière officielle, Rio Tinto doit obtenir des blancs-seins en matière environnementale et forestière pour voir son plan approuvé.