3 novembre, 2016Le bilan de l’incendie sur le chantier de démolition navale de Gadani est passé à 21 morts avec pas moins de 150 personnes toujours prises au piège sur le navire en feu.
Un incendie fait rage à bord d’un pétrolier sur le chantier de démolition navale de Gadani, au Pakistan, avec toujours prisonniers à l’intérieur des travailleurs dont on estime que le nombre pourrait aller jusqu’à 150. Un réservoir de gaz a explosé à l’intérieur du pétrolier ce mardi et les pompiers luttent pour maîtriser le brasier.
Nos affiliés rapportent que les efforts menés pour secourir les travailleurs pris au piège ont été vains et que les pompiers n’ont pas à disposition la mousse nécessaire pour lutter contre un incendie d’origine chimique. 70 travailleurs sont à l’hôpital, dont 15 en état critique avec de graves brûlures.
La Fédération nationale des syndicats du Pakistan (NTUF) a appelé à trois jours de grève et de deuil sur les chantiers navals qui emploient environ 9.000 travailleurs.
La NTUF a l’intention de poursuivre pour meurtre les propriétaires du navire ainsi que l’opérateur et de déposer une requête constitutionnelle auprès de la plus haute cour de justice contre les départements ministériels responsables, dont ceux du travail, de la sécurité sociale et de l’environnement.
Ce pétrolier avait été construit en 1982 au Japon et est arrivé sur la parcelle n°54 du chantier de Gadani le 15 octobre, avec 250 travailleurs prévus pour son démantèlement. Ce navire avait des propriétaires indonésiens avant d’être vendu à l’entreprise Ghafoor de démolition de navires de Gadani, mais son immatriculation avait été transférée à Djibouti quelques semaines avant son arrivée. À ce stade, le nom du navire avait été changé de Federal 1 à Aces.
L’explosion s’est produite en raison de la présence de gaz inflammables et toxiques à l’intérieur des réservoirs de carburant du navire. On a forcé les travailleurs à en entamer le démantèlement avant que le réservoir n’ait pu être nettoyé et débarrassé des résidus de carburant.
Le démantèlement d’un navire est effectué au moyen de chalumeaux au gaz, ce qui a conduit à ce désastre. La déflagration a été si intense que l’on a pu voir de lourdes plaques de métal traverser les airs pour être retrouvées jusqu’à deux kilomètres du lieu du sinistre.
Nasir Mansoor de la NTUF indique :
“Des accidents comme celui-ci sont devenus la routine. Gadani n’est pas qu’un cimetière de bateaux, c’en est aussi un pour les ouvriers des chantiers.
“La responsabilité de ces décès pèse sur les épaules des ferrailleurs. Les autorités, y compris la police et le département du travail, sont en collusion avec les propriétaires des chantiers pour leur permettre d’être blanchis de ces meurtres.
“Les tout-puissants ferrailleurs de navires font la loi et les travailleurs sont traités comme s’ils n’étaient même pas humains.
La NTUF fait compagne en faveur des droits des démolisseurs de navires depuis dix ans. Très récemment, ce 30 octobre, les travailleurs manifestaient encore pour revendiquer leur droit à la santé et la sécurité professionnelles.
Dans le sillage de cette dernière en date des catastrophes, la NTUF exige un changement radical des mesures de sécurité au sein des chantiers, ainsi qu’une indemnisation pour les blessés et les familles des travailleurs décédés.
Le Commissaire adjoint du district de Lasbela a ordonné un arrêt complet du travail à Gadani. La police a arrêté l’opérateur et ordonné l’arrestation du propriétaire du navire ainsi que celle du président de l’association des ferrailleurs de navires.
IndustriALL Global Union a écrit au Premier Ministre du Pakistan, M. Muhammad Nawaz Sharif, pour exhorter le pays à ratifier la Convention internationale de Hong Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires.
Le Secrétaire général d’IndustriALL, Valter Sanches, a déclaré :
“Une négligence constante des mesures de sécurité et un mépris de l’état de droit de la part des employeurs et des autorités ont fait de Gadani un champ de mort.
“Il n’est pas acceptable que les démolisseurs de navires au Pakistan doivent risquer leur vie quotidiennement pour assurer leur subsistance.”
Gadani est le troisième plus grand chantier de démolition de navires au monde. Il est constitué de pas moins de 132 parcelles sur une plage de 10 km de long sur le territoire de Gadani, au Pakistan, à environ 50 kilomètres au nord-ouest de Karachi.