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14 décembre, 2020Les 8 et 9 décembre derniers, un atelier a rassemblé des participants provenant de Turquie, des trois affiliés turcs d’IndustriALL du secteur de la métallurgie, Türk Metal, Özçelik-İş et Birleşik metal-İş, ainsi que des États-Unis, de France, d’Italie et d’Allemagne, pour débattre de l’utilisation des accords-cadres mondiaux et d’autres instruments internationaux comme outils de syndicalisation.
La liberté syndicale et le droit à la négociation collective sont des droits constitutionnels en Turquie, mais les activités des syndicats se heurtent à de nombreux obstacles. Le chemin qui mène à la syndicalisation et à la reconnaissance des syndicats est semé d’embûches. La Turquie est régulièrement critiquée par l’OIT et l’UE pour ne pas veiller au respect des droits fondamentaux des travailleurs.
C’est dans ce cadre qu’IndustriALL Global Union a organisé un atelier sur le renforcement du pouvoir des syndicats par le biais des accords-cadres mondiaux (ACM) et d’autres instruments en préparation pour la réglementation des chaînes d’approvisionnement dans le secteur automobile en Turquie, réunissant les trois affiliés du secteur métallurgique du pays.
Les ACM servent à protéger les intérêts des travailleurs et travailleuses au sein de l’ensemble des activités d’une entreprise multinationale. Les ACM établissent les meilleures normes en matière de droits syndicaux, de santé, de sécurité et de pratiques environnementales, ainsi que s’agissant des principes de qualité du travail au niveau de l’ensemble des activités d’une entreprise à l’échelle mondiale, que ces normes existent ou non dans un pays donné. IndustriALL compte des ACM avec Renault, MAN, Daimler, Volkswagen et Ford, qui tous développent d’importantes activités en Turquie.
“En raison des violations systémiques des droits fondamentaux du travail en Turquie, il nous incombe, en tant que fédération syndicale internationale, d’en informer le monde. Nous devons veiller à ce que les multinationales en soient conscientes et puissent agir en fonction de ces informations,”
a indiqué le Directeur d’IndustriALL pour le secteur automobile, Georg Leutert.
“Nous devons nous assurer que la voix des travailleurs joue un rôle plus important dans le processus de diligence raisonnable des entreprises multinationales. Les syndicats doivent être reconnus comme leur principale source d’information.”
Les dirigeants des syndicats turcs ont partagé leurs défis, leurs expériences et leurs retours concernant des dossiers conflictuels au sein de la chaîne d’approvisionnement automobile.
“Nous sommes confrontés à de graves difficultés lorsque nous nous recrutons et, en tant que syndicat, il est important de préserver et de renforcer nos droits. Nous avons besoin de soutien et la solidarité internationale est cruciale pour nous,“
a déclaré Yunus Degirmenci, Président d’Özçelik-İş, en évoquant les pratiques antisyndicales chez Sampa.
Le Président de Türk Metal, Pevrul Kavlak, a souligné les problèmes auxquels les syndicats sont confrontés lorsqu’ils recrutent :
“Même lorsque nous sommes majoritaires sur le lieu de travail et que nous avons le droit de syndiquer, l’employeur peut toujours nous poursuivre en justice. Cela se produit régulièrement, ce qui rend presque impossible la syndicalisation des lieux de travail. Nous savons tous que nous ne pouvons pas nous battre seuls ; nous devons nous unir.”
Adnan Serdaroğlu, Président de Birleşik Metal-İş, a souligné ce besoin d’unité :
“Face à un gouvernement qui adopte des lois antisyndicales, a recours à des pratiques antisyndicales et au licenciement de travailleurs qui protestent contre les infractions, il est clair que nous n’avons pas le luxe d’être en désaccord les uns avec les autres. Nous devons unir nos forces pour gagner.”
Des représentants des constructeurs automobiles Volkswagen, MAN et Mercedes ont pris part à l’atelier et ont expliqué aux participants comment ils assurent la durabilité et le respect des droits des travailleurs dans leurs chaînes d’approvisionnement.
Philipp Bleckmann, de VW, a indiqué que l’entreprise allemande exige de tous ses fournisseurs qu’ils garantissent la liberté syndicale, la protection du travail et de la santé ainsi que la non-discrimination. Avec des dizaines de milliers de fournisseurs et de sous-traitants, Volkswagen réalise un grand nombre d’audits dans le monde entier et tient une base de données avec des auto-évaluations.
Mustafa Iskifoğlu de MAN Turquie a parlé de la nécessité d’avoir un dialogue avant que les problèmes ne surgissent et à cette fin, l’entreprise a une charte signée par le syndicat et l’employeur.
Yiğit Özgünel, de Mercedes-Benz Turquie, a expliqué comment son intervention a joué un rôle dans les efforts de syndicalisation de Türk Metal chez son fournisseur Bodo Bode dans la ville de Bursa.
Les participants à la réunion ont reconnu la nécessité et l’importance d’une solidarité mondiale. Forcé de protéger les droits fondamentaux des syndicats, le mouvement international doit être fort. Le syndicat américain UAW, qui représente les travailleurs de Ford, ainsi que les syndicats français FGMM-CFDT et FTM-CGT, IG Metall, d’Allemagne, et FIM-CISL, d’Italie, ont offert leur soutien solidaire aux travailleurs turcs de l’automobile.
Kemal Özkan, Secrétaire général adjoint d’IndustriALL, a souligné la nécessité de renforcer le pouvoir des syndicats dans le secteur automobile turc.
“Nous nous sommes réunis à un moment critique alors que toute la chaîne d’approvisionnement est affectée par Covid-19. Cet atelier est un bon et important point de départ ; les prochaines étapes impliquent une cartographie, des ateliers, une syndicalisation transnationale.
Les relations sociales en Turquie sont compliquées, mais en renforçant le pouvoir des syndicats et en faisant preuve de solidarité internationale, nous aurons la force nécessaire pour nous battre en faveur d’un nouveau système.”