30 octobre, 2023La section des mines d’IndustriALL a organisé une série de réunions mondiales sur trois jours afin d’élaborer les principaux points de l’ordre du jour concernant le secteur. La dernière de ces réunions, qui s’est tenue le 26 octobre 2023, a accordé une attention stratégique particulière aux matières premières critiques, car elles sont à l’avant-garde de la transition énergétique, avec des opportunités et des défis pour les travailleurs et travailleuses ainsi que leurs syndicats.
Réunissant des représentants syndicaux d’une trentaine de pays, cette dernière réunion est parvenue à un point de vue commun sur le fait que l’extraction de minerais de transition critiques (MTC) et de matières premières critiques (MPC), notamment le cobalt, le cuivre, le lithium, le nickel et les terres rares utilisées dans les technologies énergétiques propres pour la fabrication de batteries, confère aux syndicats la responsabilité de recruter les travailleurs et travailleuses dans les secteurs nouvellement apparus tout au long des chaînes d’approvisionnement.
La demande croissante de matériaux utilisés pour la transition énergétique entraîne une augmentation des investissements et de l’emploi. Dans le même temps, dans un autre segment de l’industrie minière, l’industrie du charbon est en cours d’élimination progressive et des millions d’emplois devraient y être perdus d’ici 2050, selon différentes sources.
Les participants ont souligné que ces changements ont eu des répercussions sur la demande des travailleurs et travailleuses ainsi que de leurs syndicats d’une transition juste en leur faveur dans le processus de migration vers les énergies renouvelables. Les syndicats veulent une transition juste comprenant le concept de travail décent de l’Organisation internationale du travail autour de la création d’emplois, des droits fondamentaux au travail, de la protection sociale et du dialogue social avec une forte dimension de genre, en particulier autour de la Convention 190 de l’OIT, pour mettre fin à la violence et au harcèlement dans le monde du travail.
En ce qui concerne la santé et la sécurité, plus de 200 personnes continuent de mourir chaque année dans des accidents miniers au Pakistan, l’un des pays qui n’a pas ratifié la Convention 176 de l’OIT sur la sécurité et la santé dans les mines. La campagne d’IndustriALL, en collaboration avec ses affiliés, se poursuit activement.
Les performances environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) des compagnies minières, selon les participants, doivent inclure la protection des intérêts des communautés concernées dans une approche de développement durable. La diligence raisonnable en matière de droits de l’homme, telle que définie au sein des Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, a également été soulignée comme étant importante dans le cadre des MTC et MPC afin de garantir les droits fondamentaux des travailleurs, en particulier la liberté syndicale et le droit à la négociation collective.
En outre, nos réunions mondiales ont débattu de la convergence et de l’interconnexion des différents secteurs industriels par le biais des chaînes de valeur des MTC et MPC. Les participants ont indiqué que ces convergences offraient des opportunités au secteur minier, notamment en augmentant le taux de syndicalisation. Toutefois, les pertes d’emploi et les violations des droits des travailleurs peuvent constituer des risques pour les syndicats. Des cas de violations commises par BHP, Cerrejón, Glencore, Prodeco, Rio Tinto, Vale ainsi que de multinationales chinoises en Bolivie, au Brésil, en Colombie, en République démocratique du Congo (RDC) et à Madagascar ont été cités.
L’accord sur les minéraux critiques pour la fabrication de batteries entre la RDC et la Zambie a été cité comme un exemple de coopération entre les syndicats des deux pays pour la syndicalisation des travailleurs et travailleuses des mines. Une étude sur les minerais de transition en RDC, en Afrique du Sud, en Zambie et au Zimbabwe a identifié le potentiel de création d’emplois dans les secteurs des MTC et MPC.
La réunion des femmes de l’industrie minière du 24 octobre a conclu que les femmes étaient sous-représentées dans ce secteur, mal payées, victimes de discrimination et qu’elles avaient moins de chances de recevoir une formation en cours d’emploi. Il existe un écart de rémunération entre les hommes et les femmes. La réunion a recommandé de meilleures conditions de travail, des emplois décents et de qualité pour les femmes dans les mines, la fin du harcèlement sexuel endémique et la ratification et l’intégration de la Convention 190 de l’OIT dans les législations nationales du travail et les politiques sur le lieu de travail.
La réunion du réseau mondial des syndicats des mines de charbon, qui s’est tenue le 25 octobre sur le thème du changement climatique et de l’avenir du charbon, a exhorté les mineurs concernés, par l’intermédiaire de leurs syndicats, à exiger un dialogue social et des consultations multipartites afin de protéger leurs intérêts lors des discussions relatives à la fermeture des charbonnages. En outre, le financement de la lutte contre le changement climatique par la Banque mondiale et d’autres institutions financières internationales doit inclure le dialogue social. Les participants à la réunion ont été informés des préparatifs de la COP28 et de la manière dont les syndicats feront pression en faveur d’une transition juste protégeant les intérêts des travailleurs et travailleuses.
Ben Davis, du Syndicat des Métallos USW, a indiqué que les lois étaient parfois inefficaces pour lutter contre les violations en matière de santé et de sécurité, la discrimination salariale et les problèmes de sous-traitance dans le secteur de l’exploitation des MPC à l’échelle mondiale. Toutefois, en ce qui concerne les États-Unis, il a déclaré que les clauses relatives au travail contenues dans les accords commerciaux constituaient un outil efficace. Par exemple, le “mécanisme de réaction rapide en matière de travail” de l’accord États-Unis-Mexique-Canada permet aux travailleurs de déposer des plaintes conduisant à des sanctions commerciales potentielles lorsque la liberté syndicale ou de négociation collective sont violées. Ce mécanisme a également permis d’améliorer les salaires et les conditions de travail.
“Les affiliés du secteur minier ont besoin d’un plan d’action MTC et MPC avec des stratégies de syndicalisation et des campagnes. Ce plan doit inclure une diligence raisonnable en matière de droits de l’homme et la promotion de la justice sociale et environnementale. Inclusif pour les femmes et les jeunes travailleurs, le plan doit constituer une stratégie visant à renforcer le pouvoir syndical tout au long de la chaîne d’approvisionnement,”
a déclaré Lucineide Varjao Soares, Coprésidente sectorielle d’IndustriALL.
Dominic Lemieux, également Coprésident du secteur, a pour sa part souligné :
“IndustriALL doit revoir ses stratégies et soutenir ses membres et leurs communautés face aux défis de la décarbonisation. Les compagnies minières doivent inclure les travailleurs et les communautés concernées dans leurs plans de décarbonisation par le biais du dialogue social.”
Glen Mpufane, Directeur des mines pour IndustriALL, a déclaré :
“Il est important de se concentrer sur les politiques minières nationales, car l’accès aux matières premières critiques (MPC) est un champ de bataille majeur dans les pays du Sud. Le défi est de savoir comment réaliser le transfert de technologie et l’ajout de valeur dans la chaîne d’approvisionnement pour le traitement des minerais, ce qui est essentiel pour maximiser les bénéfices de l’exploitation minière pour les pays en voie de développement. En Europe, il est nécessaire d’apporter une réponse coordonnée aux politiques de l’UE, notamment par le biais de la Battery Alliance, de l’EIT Raw Material Alliance et d’une campagne au niveau de l’UE.
L’établissement de normes et de lignes directrices spécifiques au travail tout au long de la chaîne d’approvisionnement qui relie la consommation à la production sont des revendications clés pour les syndicats.”