9 juillet, 2019Les affiliés à IndustriALL Global Union de huit pays se sont réunis à Londres, les 3 et 4 juillet 2019, à l’occasion de la cinquième réunion du réseau syndical mondial de Shell, et se sont engagés à renforcer leur collaboration, notamment au niveau de l’organisation des travailleurs de la compagnie multinationale énergétique.
Les représentants syndicaux des affiliées à IndustriALL en Belgique, au Brésil, en Colombie, aux Etats-Unis, au Maroc, au Pays-Bas, au Nigéria et en Norvège se sont rencontrés à l’occasion de la cinquième réunion du réseau, organisée avec le soutien de la FES.
La séance s’est ouverte sur la communication des informations les plus récentes sur la campagne de Shell, qui a compris, l’an dernier, la conduite d’une mission à Port Harcourt (Nigéria) ainsi que des interventions devant la Conférence internationale du Travail et le Conseil des droits de l’homme (CDH) des Nations Unies à Genève pour attirer l’attention sur les pratiques antisyndicales et les conditions de vie précaires des travailleurs contractuels employés par Shell au Nigéria. Plus récemment, IndustriALL a évoqué la question des droits des travailleurs lors de l’Assemblée générale annuelle de Shell, qui a eu lieu en mai.
Au Nigéria, l’affilié à IndustriALL, NUPENG, a indiqué que tous les travailleurs manuels sont sous-traités à Shell, et que le syndicat n’a pu organiser que les travailleurs du secteur de la logistique en raison des pratiques antisyndicales de la société.
« Les travailleurs sont automatiquement renvoyés s’ils tentent de parler à un syndicat. Quand une entreprise sous-traitante parle à un syndicat, la compagnie lui fait savoir qu’elle ne lui renouvèlera pas son contrat », a déclaré Olawale Afolabi, Secrétaire général du NUPENG.
Shell a toujours nié les allégations mais selon Afolabi:
« Il appartient à Shell de prouver que les travailleurs qui participent aux bénéfices sont protégés et ont le droit de travailler dans des bonnes conditions. Shell demande aux victimes de trouver les preuves ».
Une élément essentiel de l’objectif de la campagne de Shell est de réduire le recours à la sous-traitance à Shell, qui touche toutes les opérations.
En Norvège, Jorn Boe, membre d’Industri Energi, a fait part de la façon dont les travailleurs sont embauchés à Shell: durant quatre ans en tant que travailleurs contractuels, période au bout de laquelle ils ont droit à un emploi permanent. Arrivés pratiquement à la fin de ce laps de temps, les travailleurs sont, en réalité, mis à la porte et remplacés.
Aux États-Unis, le syndicat des Métallos a noté que l’ensemble du personnel de maintenance sera sous-traité à la nouvelle unité de craquage d’éthylène de Shell, en construction en Pennsylvanie, faisant planer des incertitudes sur la sécurité et rendant difficile leur organisation.
Le syndicat des Métallos a également déclaré que Shell aux États-Unis cherche spécifiquement à attribuer les contrats aux entreprises non syndiquées. Le syndicat des Métallos et l’affilié néerlandais FNV se sont engagés à collaborer pour accroître le nombre des travailleurs syndiqués à Shell.
Les participants ont pris connaissance des différentes approches de négociation collective présentées par le syndicat des Métallos et la FNV. Le syndicat des Métallos a négocié des augmentations de salaire et des améliorations en matière de santé et de sécurité non négligeables, alors que la FNV a également inclus des dispositions de soutien à la formation et au développement de carrière en faveur de ses membres.
En outre, la FNV a réussi à négocier un paiement supplémentaire additionnel de 20 % au maximum du salaire initial pendant deux ans pour les travailleurs employés à la filiale NUM de Shell qui prennent un emploi moins rémunéré ailleurs. Il s’agit d’offrir une Juste transition aux travailleurs qui passent du secteur des combustibles fossiles aux secteurs versant des plus bas salaires.
Le Directeur d’IndustriALL en charge du développement durable, Brian Kohler, a conseillé les participants sur la façon dont les syndicats peuvent mieux se préparer aux changements, causés par l’automatisation, la numérisation et les mesures prises pour répondre aux objectifs de réduction des émissions de dioxyde de carbone, qui touchent le secteur du pétrole.
Edson Dias Bicalho, membre de FEQUIMFAR/FS au Brésil, qui représente les travailleurs à la filiale de production d’éthanol de Shell, baptisée Raízen, a indiqué que l’augmentation de la mécanisation a non seulement réduit le nombre des blessures et des accidents au sein de l’entreprise, mais également permis aux femmes d’occuper des postes à tous les niveaux du processus de production et non pas seulement dans l’administration.
Joosje de Lang et Oluchi Amaogu-Fellix, respectivement membres de la FNV et du NUPENG, ont fait une présentation sur la façon dont les syndicats peuvent contribuer à faire tomber les barrières empêchant les femmes de travailler dans les secteurs à prédominance masculine, comme le pétrole et le gaz.
Au Maroc, Mohamed Doumar, membre du syndicat du secteur pétrolier et gazier FNTPGPA-UMT, a signalé que la négociation collective sectorielle a permis d’obtenir des augmentations de salaire pour les travailleurs de Shell. Il a également indiqué que la seule raffinerie de pétrole du pays, Samir, a fini par fermer définitivement après avoir été déclarée en état de faillite.
Shell s’apprêtant à lancer des opérations en Colombie, Ludwing Gozmez Almeida, membre de l’Union syndicale ouvrière de l’industrie du pétrole (USO), a souligné les graves menaces dont sont victimes les syndicalistes dans le pays. Au cours des 30 dernières années, plus de 100 de ses collègues syndiqués y ont été assassinés.
Les participants ont conclu la réunion avec des plans visant à se soutenir mutuellement et à renforcer leur coopération face à la diversification et aux changements affectant l’industrie pétrolière et gazière suite à l’automatisation et à la numérisation.
La Directrice d’IndustriALL pour le secteur énergétique, Diana Junquera Curiel, a déclaré:
« C’est ce que la solidarité internationale signifie. Il est vraiment important que les pays ayant des bonnes relations avec Shell et, qui ont du pouvoir, adoptent une position ferme avec la compagnie. En nous unissant, nous pouvons encore faire beaucoup plus ».