15 juin, 2018Les forces de sécurité iraniennes ont arrêté et mis en prison ce 12 juin des dizaines de travailleurs qui manifestaient contre le non-versement de leur salaire depuis des mois.
La police et les forces de sécurité s’en sont pris aux travailleurs de la National Iranian Steel Industrial Company dans la ville d’Ahvaz lorsqu’ils se sont rassemblés pour manifester sur la place Kian Pars ; environ 60 d’entre eux ont été roués de coups et placés en détention.
Ces travailleurs étaient en grève depuis 17 jours à propos de l’absence de paiement de leurs salaires par la direction depuis des mois, ainsi que contre le non-versement des cotisations sociales qui les concernent, ce qui implique que ni les travailleurs, ni leurs familles ne peuvent bénéficier de soins de santé.
Selon le Syndicat des métallurgistes et mécaniciens d’Iran (UMMI), affilié à IndustriALL Global Union, 46 travailleurs ont été libérés sous condition dans la soirée du 13 juin, à la suite de vastes protestations contre leurs arrestation et détention prolongée.
Cependant, la Cour révolutionnaire d’Ahvaz a refusé de libérer sous condition un certain nombre de travailleurs, dont Karim Siyahi, Mohammad Ali Jamaati, Mohammad Falahi et Javad Eskandari, au prétexte que des poursuites étaient engagées par des plaignants privés au sujet de bris de vitre dans des bureaux de Membres du Parlement au cours des premières manifestations dans la ville.
Les manifestations contre les versements sans cesse reportés des salaires, et la grave pression financière que cela entraîne pour les travailleurs et leurs familles, ont débuté en décembre 2017, et depuis lors, des négociations sont en cours pour le versement des arriérés de salaire ainsi que pour assurer que les employeurs paient une prime de fin d’année (à verser le 21 mars pour coïncider avec le Nouvel An iranien) et pour que soient rencontrées leurs obligations par rapport aux prélèvements sociaux.
Début mars, certains ont reçu, en partie ou en totalité, les salaires qui leur étaient dus, mais ceci ne concernaient donc par tous les travailleurs. Ainsi donc, le modèle consistant à ajourner, au moins en partie dans le meilleur des cas, le versement des salaires ainsi que la situation concernant les versements en matière de sécurité sociale de la part des employeurs, perdurent.
En octobre 2017, la Banque Nationale d’Iran a vendu le complexe sidérurgique à un magnat iranien, Abdolreza Mousavi, dans le cadre de démarches visant à couvrir ses dettes. L’entreprise, qui emploie 4.000 travailleurs, a été gravement mal gérée et fonctionne à une fraction de sa capacité. Les travailleurs font état du fait que des machines et de l’outillage ont été vendus. Le mois dernier, la propriété de l’entreprise aurait été rétrocédée à la Banque Nationale, mais les travailleurs indiquent que Mousavi se présenterait toujours à l’usine et que l’identité du propriétaire n’est pas claire.
Un porte-parole de l’UMMI déclare :
“L’UMMI appelle à la libération immédiate et inconditionnelle des sidérurgistes manifestants qui restent en détention. Ils sont innocents de tout délit et n’ont rien fait pour mériter d’être privés de liberté. De plus, nous appelons les autorités et la direction de l’entreprise à engager un dialogue avec les syndicats indépendants qui relaient les revendications des travailleurs, afin que le conflit puisse se régler rapidement et dans les règles. L’UMMI condamne également l’arrestation, l’emprisonnement, les mauvais traitements et la torture de travailleurs qui avancent de légitimes revendications quant au versement de leurs salaires.”
Le Secrétaire général adjoint d’IndustriALL, Kemal Özkan, déclare :
“Nous appelons le gouvernement iranien à intervenir d’urgence pour porter remède à la situation précaire de la National Iranian Steel Company. Nous revendiquons la libération de tous les travailleurs emprisonnés et que l’Iran se conforme aux conventions 87 et 98 de l’OIT qui garantissent aux travailleurs de pouvoir exercer leurs droits à poursuivre des activités syndicales légitimes et à négocier collectivement.”
***UPDATE***
Ce 21 juin, l’UMMI a fait savoir que six militants connus étaient toujours détenus alors que le reste des manifestants a été relâché.