25 avril, 2017Le Réseau du pétrole et du gaz du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord d'IndustriALL Global Union s'est réuni à Beyrouth, au Liban, les 19 et 20 avril, pour élaborer des stratégies de renforcement de la puissance syndicale dans la région.
Cette réunion, parrainée par la Fondation Friedrich Ebert, était la troisième du réseau, créé en 2015 dans le but de renforcer la coordination entre les syndicats. Trente-cinq délégués de 16 syndicats de 12 pays y assistaient, représentant la plupart des grandes compagnies pétrolières et gazières présentes dans la région.
Les participants ont eu des débats animés sur les enjeux de la région : des compagnies qui se comportent en exploiteurs, des gouvernements répressifs et le chaos et la déstabilisation provoqués par la guerre en Syrie et au Yémen et la crise des réfugiés qui en résulte.
Les discussions ont porté sur les suites de la grève menée à bien l'an dernier au Koweït et sur la création d'un nouveau syndicat des travailleurs du secteur privé dans ce pays.
Le cas des travailleurs de DNO au Yémen, abandonnés par leur employeur lorsque la guerre a éclaté, a été mis en évidence et les participants ont promis leur soutien et leur solidarité pour obtenir justice pour ces travailleurs.
Les pratiques des entreprises de la région diffèrent fortement, avec des compagnies comme DNO et ExxonMobil qui se comportent comme des exploiteurs, et d'autres, comme Total, ouvertes au dialogue social. En Irak, un accord a été conclu avec Shell pour la création d'un syndicat regroupant 6.000 salariés des gisements gaziers.
Toutefois, Khaled Bettine, venu de Tunisie, a déclaré :
"Les compagnies pétrolières étrangères n'investissent pas dans le long terme. Quant les cours du pétrole chutent, elles disparaissent sans indemniser les travailleurs."
La question de la privatisation a fait polémique au Maroc où la raffinerie d'État SAMIR a été privatisée, avant d'être fermée et mise en liquidation, mettant en danger des milliers d'emplois. L'entreprise cherche actuellement un repreneur.
Le directeur des ressources humaines de Total, Olivier Chavanne, s'est adressé aux participants par vidéoconférence depuis Paris. IndustriALL a un accord-cadre mondial avec Total et la direction s'est engagée à respecter le droit des travailleurs de se syndiquer. Le dialogue social qui se poursuit avec cette entreprise contribue à faciliter les relations professionnelles.
La guerre et la crise des réfugiés, ainsi que la répression qui a suivi le printemps arabe sont des sujets de préoccupation majeurs. Comme l'a déclaré l'Irakien Hassan Jumaah :
"L'État islamique a occupé 20 de nos meilleurs gisements pétroliers les plus productifs, puis il y a mis le feu. Nous réparons les puits qui ont été endommagés, mais une part importante du patrimoine national a été gâchée."
À propos de la crise des réfugiés et de l'afflux de travailleurs migrants, Latifa Benwakrim, du Maroc, a déclaré :
"Nos économies sont chancelantes parce que nos gouvernements sont inefficaces. Ce ne sont pas les réfugiés qui posent problème. Pour un syndicat prônant la justice sociale, défendre les réfugiés est un devoir."
Mais Sleiman Hemdan a fait remarquer que le Liban accueille 1,5 million de réfugiés pour une population de moins de 5 millions d'habitants.
"Nous vivons des temps exceptionnels, et nous sommes très proches de la frontière avec la Syrie. Nous sortons aussi de 17 années de guerre civile. Nous voulons être ouverts, mais nous avons un taux de chômage de 38% et une croissance zéro."
La directrice d'IndustriALL en charge de l'énergie, Diana Junquera Curiel, a rendu compte des résultats d'une étude visant à déterminer les priorités en matière d'organisation. Cette étude compare la législation du travail, la ratification des conventions de l'OIT, la santé et la sécurité, les niveaux de salaires, le statut des femmes et des jeunes, le recours croissant au travail précaire et les taux de syndicalisation dans la région.
Pour Diana,
"Les priorités mentionnées par nos affiliés sont la protection sociale des travailleurs, suivie par l'intégration des femmes et des jeunes dans les structures syndicales, la nécessité de combattre le travail précaire et de dispenser une formation à la négociation et au dialogue."
Pour répondre à ces priorités, le réseau a élaboré et approuvé un plan d'action qui prévoit le renforcement des réseaux d'entreprise et des réseaux par pays, l'élaboration d'une stratégie commune pour lutter contre le travail précaire, et le développement du dialogue social au niveau régional.
Le programme de développement du réseau suivra ce processus :
- Formation du réseau et mise en place d'une communication régulière et solide
- Échange effectif d'informations et d'expériences
- Solidarité en temps de conflit
- Développement de réseaux d'entreprise régionaux
- Amorce du dialogue avec les entreprises
Le Secrétaire général adjoint d'IndustriALL Kemal Özkan a pris la parole pendant la réunion et s'est aussi entretenu en privé avec bon nombre des délégations auxquelles il a promis son soutien, ainsi qu'une aide et des conseils pratiques. Il a déclaré :
"Je suis extrêmement satisfait des progrès qui ont été réalisés dans la région, où nous avons constaté de très nettes avancées.
"Nous continuerons à soutenir nos affiliés pour bâtir un réseau solide et interpeler les gouvernements comme les multinationales du pétrole et du gaz."