10 octobre, 2024Le Forum stratégique sur syndicalisation et la négociation collective en Afrique a été lancé au Rwanda, à Kigali, ces 3 et 4 octobre, sous le slogan “Building African Workers’ Power in Our Lifetime” (Construire le pouvoir des travailleurs africains de notre vivant).
Ce forum a rassemblé plus de 80 syndicalistes de 28 pays africains, plus de 50 pour cent des 55 États membres de l’Union africaine, avec quelques participants venus de Belgique, de Turquie et d’Irlande. Parmi les participants figuraient des affiliés des organisateurs de la conférence, de la CSI-Afrique, de la CSI, des organisations syndicales régionales et des fédérations syndicales internationales, à savoir l’IBB Afrique et Moyen-Orient, UNI Afrique et IndustriALL Afrique subsaharienne. Le forum a été accueilli par la Centrale des Syndicats des Travailleurs du Rwanda (CESTRAR), la centrale syndicale rwandaise.
Le thème du forum, “Syndicalisation et négociation collective : collaborer pour améliorer la défense et la protection des droits des travailleurs et la régénération syndicale”, a trouvé un écho dans les débats. Les questions abordées portaient notamment sur la nécessité impérieuse de renforcer le pouvoir syndical et l’unité des travailleurs africains par le biais de la syndicalisation et de la négociation collective. En outre, il a été estimé que les syndicats pourraient également renforcer leur pouvoir en coopérant avec les organisations de la société civile.
Ce forum est le résultat de l’engagement des fédérations syndicales internationales à travailler en étroite collaboration pour résoudre les problèmes des travailleurs sur le continent.
Le forum a mis en évidence plusieurs obstacles auxquels sont confrontés les syndicats africains et qui affaiblissent leur pouvoir de négociation, ainsi que les moyens de les surmonter. Parmi ces obstacles figurent le faible taux de syndicalisation et la fragmentation dans la plupart des secteurs. Il existe également une concurrence entre les syndicats, car différents syndicats recrutent auprès des mêmes travailleurs. Il a été recommandé aux syndicats de se concentrer sur les travailleurs non syndiqués. Les stratégies visant à impliquer l’économie informelle, où la plupart des travailleurs et travailleuses du continent gagnent leur vie, sont également insuffisantes.
En ce qui concerne le travail précaire, il a été constaté que l’augmentation du travail informel et de plateforme, caractérisé par des contrats à court terme, la précarisation, les bas salaires ainsi que l’absence de protection sociale, a érodé la sécurité de l’emploi.
Le forum s’est inquiété de la sous-représentation des jeunes et des femmes dans les activités syndicales, constituant pourtant une part importante de la main-d’œuvre. Bien qu’il y ait une forte population de jeunes en Afrique, avec plus de 60 à 70 pour cent de moins de 35 ans, il a été relevé que les syndicats ne semblaient pas avoir de stratégies appropriées pour recruter les jeunes travailleurs.
Le recours aux actions judiciaires pour opprimer les travailleurs par le biais du dénigrement des syndicats, qui est courante dans des pays comme Madagascar, le Swaziland et le Zimbabwe, a été identifié comme une menace pour la syndicalisation, car il limite l’action collective, en particulier le droit de grève et les piquets de grève. Il a été indiqué que certains gouvernements africains étaient réticents à ratifier et à mettre en œuvre les conventions internationales du travail.
Akhator Joel Odigie, Secrétaire général de la CSI-Afrique, a déclaré :
“La décolonisation reste un projet inachevé, les systèmes politiques, économiques et environnementaux ne répondant pas aux aspirations des travailleurs africains. Cela signifie qu’une stratégie visant à construire un mouvement syndical fort par le biais de la technologie est nécessaire”.
“Face à des défis sans précédent tels que les guerres insensées, les attaques contre le niveau de vie et l’insécurité de l’emploi, les syndicats doivent s’unir et utiliser les médias sociaux comme outil de recrutement”,
a souligné Keith Jacobs, Secrétaire régional d’UNI Afrique.
Rose Omamo, Vice-présidente de la CSI-Afrique et Vice-présidente d’IndustriALL a ajouté :
“Des stratégies de syndicalisation novatrices qui soulignent la nécessité pour les syndicats d’adopter de nouvelles méthodes, telles que la syndicalisation tout au long des chaînes d’approvisionnement et la négociation pour les travailleurs et travailleuses de l’économie de plateforme, sont essentielles. En outre, les syndicats doivent développer une gouvernance démocratique interne tout en donnant la priorité à l’inclusion, en particulier pour les femmes, les jeunes et les travailleurs migrants”.
Le forum s’est engagé à mettre l’accent sur l’éducation des travailleurs, la formation aux négociations collectives, la promotion de l’unité des travailleurs et l’élaboration de stratégies visant à syndiquer les travailleurs informels et ceux des plates-formes. Des stratégies seront également élaborées pour les jeunes travailleurs et les femmes dans le cadre du plan d’action du forum.