23 octobre, 2024Le 14 octobre, IndustriALL a rencontré des affiliés ukrainiens afin d'évaluer les conditions de travail et d'existence et de concevoir une ligne à suivre pour la reconstruction de l'après-guerre. Les débats ont souligné l'absolue nécessité pour les organisations syndicales de jouer un rôle central pour veiller à ce que les droits et les besoins des travailleurs soient garantis lorsque l'Ukraine se reconstruira.
Le secrétaire général d'IndustriALL, Atle Høie, a souligné la nécessité de faire régulièrement le point afin d'identifier où apporter leurs contributions. Il a averti que cette reconstruction sera massive et qu'il est essentiel que des systèmes soient en place pour la distribution de l'argent et pour assurer la participation du mouvement syndical.
Les syndicats ont décrit les enjeux de leur situation. La hausse des taxes a aggravé les choses, avec de nouvelles pressions sur les Ukrainiens. Mais aussi, le pays perd des travailleurs très qualifiés, indispensables pour sa restructuration future. Les syndicats ont aussi souligné l'insuffisance de l'internet, les pénuries d'électricité, de charbon, et d'autres articles essentiels pour l'hiver, qui constituent autant de difficultés majeures. Quant aux femmes, elles doivent descendre dans la mine pour remplacer les hommes partis à la guerre.
À l'approche de l'hiver, les syndicats expliquent que, bien que le secteur nucléaire soit prêt, 80 pour cent des centrales ont été détruites. Cette dévastation pèse énormément sur les travailleurs du nucléaire qui doivent maintenant assurer l'approvisionnement énergétique du pays. Sans énergie, l'Ukraine ne pourra se reconstruire. Les travailleurs risquent leur vie chaque jour lorsqu'ils réparent des infrastructures endommagées par d'incessants bombardements.
Valeriy Matov, le président de notre affilié Atomprofspilka, a déclaré :
"Nous sommes prêts à relever les défis qui se posent. Nous avons achevé les réparations dans les centrales et elles sont en service. Le travail est très lent et il n'est pas toujours de la meilleure qualité, mais nous remédierons aux problèmes l'un après l'autre. Nous créons aussi des systèmes de protection."
Une grande partie de la main-d’œuvre a disparu, ce qui a entraîné une baisse sensible des effectifs des syndicats. L'absence de cotisations rend les syndicats financièrement vulnérables et ils doivent se battre pour poursuivre leur action essentielle. Casper Edmonds, qui représentait l'Organisation internationale du travail (OIT), a résumé l'intervention de son organisation en Ukraine :
"Nous documentons les violations des droits des travailleurs, nous suivons la situation du secteur minier et du secteur de l'énergie et nous constatons que la situation des travailleurs empire."
Casper Edmonds a ajouté que l'OIT étudie les politiques des États-Unis et du Japon, notant un engagement à financer la reconstruction de l'Ukraine. Quoi qu'il en soit, il est essentiel de se concentrer sur les travailleurs du secteur de l'énergie qui auront besoin de formations qualifiantes pour les tâches qui les attendent.
Les syndicats ont décrit leurs besoins les plus pressants : transformateurs, générateurs et aide financière. Les salaires étant dramatiquement bas, le besoin d'investissements dans les industries en Ukraine est plus criant que jamais. Ils ont réaffirmé qu'il est essentiel d'associer les syndicats au processus de reconstruction, pas seulement pour protéger les travailleurs mais aussi pour veiller à ce qu'il soit répondu à leurs besoins. Ils craignent qu'une exclusion des syndicats fasse échouer l'effort de reconstruction.
Brian Milakovsky et Volodymyr Vlasiuk, les auteurs de l'étude "La politique d'IndustriALL pour la survie de l'Ukraine - Inverser 30 années de désindustrialisation" préparée pour la Fondation Friedrich Ebert (FES), ont présenté des recommandations de politique industrielle indispensables pour la reconstruction de l'Ukraine. Il s'agit notamment d'instituer un conseil de la politique industrielle habilité à proposer des réformes législatives et réglementaires qui seront le moteur de la réindustrialisation. Ce conseil serait appuyé par des experts-conseillers afin de renforcer la capacité de l'Ukraine à concevoir et mettre en œuvre des politiques industrielles efficaces. Par-dessus tout, la politique devra donner la priorité à la localisation et au contenu local, tout en se concentrant sur l'augmentation de la production d'armes, la décarbonation des systèmes énergétiques pour davantage d'efficacité et de résilience, et développer le soutien financier aux efforts de réindustrialisation.
Mikhaïlo Volynets, le président du Syndicat indépendant des mineurs (NPGU) et de la Confédération des syndicats indépendants d'Ukraine (KVPU), a déclaré :
"Merci à IndustriALL pour l'intérêt que vous portez à l'Ukraine. Nous faisons tout notre possible pour ramener les gens chez eux. Les syndicats insistent pour que les salaires aillent de pair avec l'inflation et le PIB, et cela doit inclure les mineurs. Nous essayons de nous adresser à différentes organisations syndicales et nous nous efforçons de reprendre notre pays."
Le secrétaire général adjoint d'IndustriALL Kemal Özkan a déclaré :
"Nous continuerons à réagir aux besoins de nos affiliés d'Ukraine en mobilisant tous nos efforts et toutes nos ressources. Les syndicats ukrainiens jouent un grand rôle dans la reconstruction de leur pays, avec une vie sociale et économique viable, et nous sommes solitaires avec eux."
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