12 octobre, 2023Les syndicats ukrainiens s'élèvent contre l'ajout de dispositions sur le lockout dans les articles 48 à 52 du projet de loi sur les conflits collectifs du travail qu'étudie actuellement le parlement. Ces dispositions, qui donneraient plus de pouvoir aux employeurs et priveraient les travailleurs de certains droits acquis, sont contraires à la Constitution ukrainienne et aux normes internationales du travail.
L'ajout de ces dispositions sur le lockout légitime le droit des employeurs de recourir au lockout et réduit à néant les avancées obtenues en matière de grève. Pour la moindre violation de la propriété privée, la grève pourrait être déclarée illégale, donnant droit à une indemnisation pour l'employeur.
Ces dispositions ne promeuvent pas les droits des travailleurs; le nombre de travailleurs susceptible de faire grève légalement pourrait être limité, ne dépassant pas trois ou cinq personnes. Une grève d'avertissement ne pourrait être lancée qu'une seule fois et pour un maximum de 60 minutes pendant toute la durée du conflit du travail.
L'inadmissibilité du lockout mentionnée aux articles 48 à 52 de ce projet de loi est confirmée par les pratiques observées par le Comité européen des droits sociaux. En outre, le comité insiste sur le fait que le droit au lockout ne doit pas être vu comme offrant une protection totale et extensive, contrairement au droit de grève.
Soulignant en quelle manière les nouveaux ajouts menacent les simples travailleurs et les adhérents d'un syndicat, le KVPU a lancé une campagne dans laquelle des dirigeants syndicaux expriment leurs préoccupations et leurs positions aux députés.
Pour Isabelle Barthès, secrétaire générale adjointe par intérim d'IndustriALL Europe :
"Si l'avenir de l'Ukraine est au sein de l'Europe, comme l'affirme le président de la Commission européenne, nous insistons pour qu'elle fasse siens les éléments essentiels du modèle social européen.
Le droit de grève et la négociation collective sont des éléments essentiels du modèle social européen. Sans le droit de recourir à une action collective efficace, la négociation collective est désarmée, or nous avons besoin de la négociation collective pour obtenir un partage équitable de la richesse et de bonnes conditions de travail. Nous sommes aux côtés de nos collègues ukrainiens et nous continuerons à alerter l'UE sur les tentatives d'affaiblissement des droits des travailleurs."
"À l'échelon international, le droit de grève est régi par la convention 87 de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. À l'échelon national, il est inscrit dans l'article 44 de la Constitution ukrainienne. Considérant que les dispositions sur le lockout violent la Constitution et les normes internationales du travail, IndustriALL réclame la suppression de ces dispositions du projet de loi sur les conflits collectifs du travail,"
a déclaré le secrétaire général d'IndustriALL, Atle Høie.
IndustriALL et IndustriALL Europe ont envoyé ensemble des lettres au président et au parlement ukrainiens pour marquer leur opposition à l'ajout de ces dispositions au motif qu'elles violent les droits des travailleurs.
IndustriALL et IndustriALL European Trade Union appellent l'Union européenne à soulever cette question auprès des autorités ukrainiennes dans le contexte du processus d'intégration.
IndustriALL appelle aussi l'Organisation internationale du travail (OIT) à intervenir pour s'opposer à l'ajout des dispositions sur le lockout dans le projet de loi.
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