6 juillet, 2020Quatre travailleuses ont été licenciées par SF Trade à Izmir, en Turquie, pour avoir mis sur pied un syndicat dans cette entreprise de cuir et de textile.
L’année dernière, les travailleurs et travailleuses de SF Trade, qui fournit en textile et cuir des enseignes de stature mondiale, ont lancé une campagne pour mettre sur pied un syndicat. Il s’agissait que les heures supplémentaires soient payées, que le travail ne soit pas soumis à des impératifs de production excessifs et d’être respectés. Leur choix s’est porté sur Deriteks, affilié d’IndustriALL Global Union, pour les représenter et le recrutement d’adhérents a débuté.
La direction de l’entreprise n’a pas tardé à lancer des tactiques antisyndicales. Ayşe et Pınar, deux femmes à la tête de la campagne de syndicalisation, ont été licenciées le 25 octobre 2019, prétendument pour leurs mauvaises performances. Elles ont été emmenées dans des pièces séparées, sans leur téléphone portable, et on leur a imposé de signer des lettres de démission, sous peine de perdre leurs indemnités de licenciement. Elles ont alors entamé un piquet de grève devant leur usine de la Zone de libre-échange de la mer Égée, près d’Izmir.
La direction continue de menacer les travailleurs et travailleuses de licenciement en cas d’adhésion au syndicat. En décembre 2019, Nurcan a été contrainte de démissionner du syndicat et Sevcan en janvier 2020. Tous deux ont été licenciées.
L’entreprise continue de violer les normes internationales fondamentales du travail ainsi que les droits constitutionnels turcs. L’entreprise a de nouveau intenté des poursuites en dommages et intérêts, accusant les travailleurs et travailleuses de nuire à la compétitivité en raison de leurs publications dans les médias sociaux.
SF Trade a un historique antisyndical. En 2015, les syndiqués se sont battus et ont obtenu justice au sein l’entreprise après une lutte de longue haleine. L’entreprise attaque à nouveau le syndicat et... rencontre la même résistance.
En 2015, l’entreprise, qui s’appelait alors SF Leather, a licencié 14 travailleurs et travailleuses pour avoir rejoint Deriteks. SF Leather a tenté de mettre fin à la campagne de syndicalisation en forçant les membres du syndicat à démissionner de Deriteks. L’entreprise a poursuivi les travailleurs et le syndicat en justice, les accusant de nuire aux intérêts commerciaux de l’entreprise.
À l’issue d’une campagne mondiale et de 198 jours de lutte, Deriteks et SF Leather sont parvenus à un accord. SF Leather a versé des indemnités aux travailleurs et travailleuses et a retiré les poursuites engagées contre Deriteks.
Le président du syndicat de Deriteks, Musa Servi, a déclaré :
“Il est très clair que le SF Trade ne viole pas seulement les droits des travailleurs mais aussi les droits humains fondamentaux. Nous connaissons ces tactiques antisyndicales depuis 2015 et nous avons gagné chez SF Trade cette année-là. La solidarité internationale l’emportera à nouveau. L’entreprise doit respecter le droit des travailleurs et travailleuses à se syndiquer. Nous poursuivrons ce combat avec nos membres jusqu’à ce qu’ils soient réintégrés et que l’entreprise entame un dialogue social avec notre syndicat.”
Les quatre femmes licenciées ont fait du piquetage jusqu’à ce que la pandémie de coronavirus frappe la vie quotidienne. Le combat se poursuit au tribunal. Elles ont lancé un appel lors du 100e jour de piquetage en février : “Les femmes ne doivent pas nous abandonner dans notre lutte”.
Christina Hajagos-Clausen, Directrice de la section textile et confection d’IndustriALL, ajoute :
“Nous voulons rappeler à SF Trade qu’il est de l’entière responsabilité de l’entreprise de s’assurer que les droits des travailleurs sont respectés et qu’une diligence raisonnable est exercée. Nous demandons à SF Trade de réintégrer les travailleuses licenciées sans condition et de construire des relations sociales durables avec Deriteks.
La solidarité des femmes travailleuses dépasse les frontières. Elles ont de la détermination, elles ont le pouvoir de gagner. Les femmes de SF Trade ne sont pas seules dans leur lutte.”