27 novembre, 2014Le 19 novembre 2014, le procureur public de la cour suprême de cassation d’Italie a cassé le jugement rendu par le tribunal de Turin qui condamnait le milliardaire Suisse, Stephan Schmidheiny, l’un des propriétaires du groupe Eternit, au motif que le jugement n’était pas applicable en raison de la longue période écoulée depuis le temps où le délit a été commis.
En juillet 2011, le milliardaire Suisse Stephan Schmidheiny, âgé de 67 ans, et le baron belge Louis de Cartier de Marchienne (décédé depuis en mai 2013), propriétaires du groupe Eternit, comparaissaient à la 51ème audience du tribunal de Turin, sous l’accusation de faute délibérée pour la protection de leurs salariés et des personnes vivant à proximité des usines, en provoquant des milliers de décès occasionnés par l’amiante. http://www.industriall-union.org/fr/archive/imf/les-proprietaires-deternit-risquent-20-ans-de-prison. L’Eternit produite est utilisée pour fabriquer de l’amiante-ciment et d’autres produits dans des usines en Europe, en Afrique et en Amérique du Sud.
Des sifflets et des cris “Honte! Honte!” ont explosé dans la salle du tribunal après l’annonce de la décision. L’abandon des chefs d’accusation contre les propriétaires du groupe est une gifle infligée à près de 3.000 victimes qui, selon le bureau des procureurs de Turin, travaillaient dans les quatre usines italiennes d’Eternit à Cavagnolo, Casale Monferrato, Rubiera, près de Reggio Emilia, et Bagnoli, près de Naples, ou vivaient près de ces usines. La décision annule également les montants compensatoires aux victimes et à leurs familles.
Les affiliés italiens de IndustriALL ont contribué activement, par le biais de leurs fédérations syndicales nationales CGIL, UIL et CISL, aux audiences du procès contre Eternit, et ont coopéré étroitement avec l’Association italienne des proches des victimes de l’amiante (AFEVA).
Maurizio Marcelli, chef du département de santé et de sécurité de FIOM-CGIL a déclaré que la décision de la Cour de Cassation “est une page honteuse du système judiciaire italien”. “Les juges ont préféré de se cacher derrière la “chicane” d’un délai de prescription, en défendant un droit abstrait plutôt que de rendre justice aux nombreux travailleurs/euses et citoyens/ennes décédés en raison de l’amiante."
Giuseppe Farina, secrétaire général de la confédération CISL, a dit: "Cette requête concernant l’analyse de la prescription est surréelle quand les effets nocifs d’une exposition à l’amiante continuent dans de nombreux cas après plus de 40 ans, et cela n’a donc rien à voir avec le temps écoulé dans les procédures judiciaires.”
Paolo Carcassi, secrétaire général de l’UIL, a commenté de son côté: “Depuis 1992, notre pays interdit l’emploi et la commercialisation de l’amiante. Cependant les maladies occasionnées par l’amiante ont une période de latence de plus de vingt ans. C’est pourquoi le fait d’invoquer un délai de prescription à compter du moment où l’amiante a été produite, au lieu du moment où la maladie s’est déclarée, signifie assurer l’impunité de ceux qui savaient qu’il s’agissait d’une substance carcinogène et sont donc pénalement responsables après avoir tout fait pour cacher ce fait, ce qui a occasionné des milliers de morts."
Les syndicats italiens, qui se tiennent aux côtés de l’Association des proches des victimes de l’amiante, ne renonceront pas et poursuivront les procédures judiciaires sur la base d’homicide volontaire.